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OU LE TUEUR DE DAIMS.

cher, il reconnut la pirogue en question, et la prit à la remorque. Il examina ensuite l’état du ciel, le côté d’où venait le vent, et la position de ses deux pirogues. Ne voyant rien qui dût le porter à changer de plan, il s’étendit au fond de sa pirogue, et se prépara à prendre quelques heures de sommeil, afin que le retour du jour le trouvât prêt à faire tout ce que les circonstances pourraient exiger.

Quoique l’homme fatigué et habitué à une vie dure dorme profondément, même dans le voisinage du danger, Deerslayer fut quelque temps sans goûter de repos. Son esprit se reporta sur ce qui venait de se passer, et ses facultés à demi endormies lui retracèrent tous les événements de la nuit dans une espèce de songe qu’il faisait tout éveillé. Tout à coup il se leva, croyant entendre le signal de Hurry qui l’appelait au rivage ; mais tout était silencieux comme le tombeau. Les deux pirogues dérivaient lentement vers le nord ; les étoiles brillaient sur sa tête dans toute la douceur de leur gloire, et la belle nappe d’eau, entourée d’un cercle de forêts et de montagnes, était aussi calme et aussi mélancolique que si elle n’eût jamais été agitée, et que les rayons du soleil du midi ne se fussent jamais gaiement réfléchis sur son miroir limpide. Le loon fit encore une fois entendre son cri à l’extrémité du lac, et le mystère fut complètement expliqué. Deerslayer se coucha une seconde fois au fond de sa pirogue, et finit par s’endormir.


CHAPITRE VII.


Tranquille Leman, ton lac, comparé au monde étrange dans lequel je vis, m’avertit par son calme d’oublier les eaux troubles de la terre pour songer à une source plus pure. Cette voile tranquille est comme une aile destinée à m’éloigner sans bruit de l’égarement d’esprit. Jamais autrefois les rugissements de l’Océan courroucé, mais ton doux murmure ressemble à la voix d’une sœur qui me reproche d’avoir jamais été ému par un plaisir si étrange.
Byron.


L’aurore venait de paraître, quand le jeune chasseur, que nous avons laissé endormi à la fin du chapitre précédent, ouvrit les yeux. Il se leva sur-le-champ, et regarda autour de lui avec l’empresse-