blanc, parce qu’il est en état de lui être utile et de le servir. L’homme rouge est au dernier rang, ce qui prouve que celui qui l’a créé n’a jamais entendu qu’un Indien soit regardé comme autre chose qu’une créature à demi humaine.
— Dieu les a fait tous trois semblables, Hurry.
— Semblables ! Prétendez-vous qu’un nègre soit semblable à un blanc, ou que je sois semblable à une Peau Rouge ?
— Vous faites feu quand mon mousquet n’est qu’à demi armé, et vous ne m’écoutez pas jusqu’au bout, Hurry. Blancs, noirs et rouges, c’est Dieu qui nous a faits tous, et sans doute sa sagesse a eu ses motifs pour nous donner des couleurs différentes. Au total, il nous a donné à tous à peu près les mêmes sensations, quoique je ne nie pas qu’il ait donné à chaque race des dons particuliers. Ceux qu’il a faits à l’homme blanc sont christianisés, tandis que ceux qu’il a accordés aux Peaux Rouges conviennent mieux à l’état sauvage. Ainsi ce serait une grande faute dans un blanc de scalper un mort, tandis que dans un Indien c’est une vertu signalée. D’une autre part, un blanc, pendant la guerre, ne peut dresser une embuscade pour tuer des femmes et des enfants, et une Peau Rouge peut le faire. C’est une cruauté, j’en conviens ; mais pour eux c’est une œuvre licite, et pour nous c’en serait une criminelle.
— Cela dépend de savoir quel est votre ennemi. Quant à scalper ou même écorcher un sauvage, c’est ce que je regarde à peu près comme la même chose que de couper les oreilles d’un loup pour recevoir la prime payée par la colonie, ou de dépouiller un ours de sa peau. Et quant à lever la chevelure d’un Indien, vous vous trompez grandement, puisque la colonie paie la même prime pour cela que pour les oreilles de loups et les têtes de corbeaux.
— Je le sais, et c’est une mauvaise besogne, Hurry. Les Indiens eux-mêmes crient que c’est une honte, attendu que cela est contraire aux dons que le ciel a accordés aux blancs. Je ne prétends pas que tout ce que font les blancs soit christianisé, car alors ils seraient ce qu’ils devraient être, et nous savons fort bien qu’ils ne le sont pas ; mais je soutiens que les traditions, les coutumes, les lois et la couleur établissent dans les races des différences qui sont presque comme des dons du ciel. Je sais qu’il y a parmi les Indiens des tribus qui sont naturellement perverses et méchantes ; mais il y a des nations semblables parmi les blancs. Les Mingos font partie des premières, et les Français du Canada des secondes. Dans un état de guerre légitime, comme nous en avons eu une récemment, c’est un devoir d’étouffer tout sentiment de compassion en ce qui touche