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OU LE TUEUR DE DAIMS.

de Hist, au cas où elle viendrait au rendez-vous avant leur retour, ils examinèrent leurs armes et se disposèrent à entrer dans le bois. La langue de terre qui s’avançait dans le lac pouvait contenir en tout deux acres, et la partie qui formait la pointe, et sur laquelle le camp était assis, n’occupait pas plus de la moitié de cette surface. Elle était principalement couverte de chênes qui, comme on le voit d’ordinaire dans les forêts d’Amérique, s’élevaient à une grande hauteur sans projeter une seule branche, formant à leur cime une voûte de riche et épais feuillage. Au-dessous, à part la frange de buissons qui bordaient le rivage, il y avait fort peu de broussailles, quoique, par leur forme, les arbres fussent plus rapprochés qu’ils ne le sont ordinairement dans des lieux où la hache a été souvent employée, pareils à de hautes et rustiques colonnes soutenant un dôme de feuillage. La surface du sol était assez unie ; mais, près du centre, elle formait une légère élévation qui la séparait en deux parties, l’une au nord, l’autre au sud. Sur cette dernière, les Hurons avaient allumé leur feu, profitant d’une position qui le masquait à leurs ennemis, qu’ils supposaient, comme on se le rappellera, dans le château situé au nord. On voyait aussi un ruisseau qui descendait en murmurant le long des collines adjacentes, pour aller se jeter dans le lac, au sud de la pointe. Il s’était creusé un lit profond dans la portion la plus élevée du terrain, et dans un temps plus rapproché, quand ce lieu fut envahi par la civilisation, les rives sinueuses et ombragées de ce ruisseau ne contribuèrent pas peu à embellir ce site. Il coulait à l’est du campement, et ses ondes allaient se perdre du même côté, dans le grand réservoir de ce voisinage, et tout près de l’endroit qu’on avait choisi pour allumer le feu. Deerslayer, autant que les circonstances le lui avaient permis, avait étudié ces particularités, et les avait communiquées à son ami.

Le lecteur comprendra que la petite élévation de terre située au-delà du campement indien favorisait grandement la secrète approche des deux aventuriers. Elle empêchait la lueur du feu de se répandre sur l’espace qui se trouvait directement en arrière, quoique le sol s’affaissât près de l’eau, laissant ainsi à découvert ce qu’on pourrait appeler le flanc gauche de la position. Nous avons dit « à découvert », mais ce n’est pas précisément le mot, puisque la petite montagne qui s’élevait derrière les huttes et le feu, au lieu de protéger les Indiens, offrait un rempart à ceux qui s’avançaient alors furtivement. Deerslayer ne déboucha pas de la bordure de buissons exactement en face de la pirogue, ce qui l’aurait trop soudainement exposé à la lumière, le tertre ne s’étendant pas jusqu’à