Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/54

Cette page a été validée par deux contributeurs.
50
LE LAC ONTARIO.

avez appris sur mer, tandis que le Tuscarora et moi nous nous occuperons à nous mettre en garde contre tout danger.

Il entra dans les buissons à peu de distance avec l’Indien, et ils y coupèrent plusieurs grosses branches d’aunes et d’autres arbres, en prenant le plus grand soin de ne faire aucun bruit. Ils enfoncèrent ensuite le bout de ces branches dans la boue en avant des pirogues, l’eau n’étant pas profonde, et en dix minutes ils placèrent ainsi un écran entre eux et le point qui pouvait leur être dangereux. Ils mirent autant d’adresse que de promptitude à faire cet arrangement, qui fut essentiellement favorisé par la forme du rivage, par la dentelure qui s’y trouvait, par le peu de profondeur de l’eau, et par la courbure des branches supérieures des buissons vers la rivière. Pathfinder eut l’adresse de choisir des branches dont le haut se courbait de même, et dans un tel endroit il en trouva aisément, et il les coupa à quelque distance en dessous de la courbure, qu’il laissa seulement toucher l’eau, de sorte que ce petit buisson artificiel n’avait pas l’air de croître dans l’eau, ce qui aurait pu donner des soupçons, mais qu’en passant vis-à-vis, on aurait pensé qu’il était formé d’arbustes qui avaient crû horizontalement sur le bord de la rive, avant de s’être dirigés en haut vers la lumière. En un mot, tout avait été disposé avec tant de soin et d’intelligence, qu’il aurait fallu un œil doué d’une méfiance extraordinaire pour regarder cet endroit comme ayant été préparé pour s’y cacher.

— Jamais je ne me suis trouvé dans un si bon abri, — dit Pathfinder après avoir examiné son ouvrage du dehors. — Les feuilles de nos arbres touchent celles des branches qui nous couvrent la tête, et le peintre qui a été récemment dans la garnison ne saurait dire lui-même lesquelles appartiennent à la nature, et lesquelles sont les nôtres. — Mais chut ! voici Eau-douce qui revient, et en garçon sensé qu’il est, il marche dans l’eau pour cacher sa piste. Nous verrons bientôt si notre abri est bon ou non.

Jasper en revenant de sa mission ne trouvant plus les pirogues où il les avait laissées, en conclut sur-le-champ qu’elles avaient doublé la pointe pour se mettre hors de vue de l’endroit où il avait allumé le feu. Ses habitudes de précaution lui suggérèrent sur-le-champ celle de marcher dans l’eau, afin qu’il n’existât aucune communication visible entre les traces qu’ils avaient laissées sur le rivage, et l’endroit où il croyait qu’ils s’étaient