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une description. Elle aidera peut-être le lecteur à se former une idée plus juste du tableau que nous essayons de peindre.

Le vent soufflait toujours avec violence. La plupart des petits arbres courbaient la tête, comme s’ils eussent voulu baiser la terre, tandis que le frémissement du vent à travers les branches des buissons, ressemblait à un bruit de chariots courant dans le lointain.

L’air était rempli de feuilles qui, à cette saison avancée, détachées de leurs tiges, voltigeaient d’une île à l’autre comme une nuée d’oiseaux. À cette exception près, la scène était grave et silencieuse ; on pouvait supposer que les sauvages ne s’étaient point éloignés, parce que leurs pirogues et les bateaux du 55e étaient toujours réunis en groupe dans la petite crique qui avait été choisie pour port. Cette circonstance exceptée, on ne pouvait reconnaître aucun indice de leur présence. Quoique surpris par l’arrivée du cutter, dont ils étaient loin d’attendre le retour si subit, leur habitude de prudence était si uniforme et si profonde lorsqu’ils étaient en guerre, qu’au moment où l’alarme fut donnée, chaque homme se mit à couvert avec l’instinct et la ruse d’un renard qui rentre dans sont terrier.

Le même calme régnait dans la forteresse, car quoique Pathfinder et Cap pussent voir le passage, ils avaient pris les précautions nécessaires pour n’être pas aperçus. L’absence totale de mouvement et de vie sur le cutter était encore plus remarquable.

Les Indiens en contemplant sa marche rapide, en apparence non dirigée, éprouvèrent un sentiment d’inquiétude, et les plus hardis de la troupe craignirent l’issue d’une expédition commencée sous des apparences si prospères. Arrowhead lui-même, habitué à communiquer avec les blancs des deux côtés des lacs, s’imagina qu’il y avait un mauvais présage dans l’apparence de ce bâtiment sans équipage, et il eût souhaité volontiers être débarqué de nouveau sur le continent.

Pendant ce temps, les progrès du cutter étaient toujours aussi rapides ; il suivait le milieu du passage, tantôt se courbant sous une rafale, tantôt se relevant de nouveau, comme le philosophe courbant la tête sous les calamités de la vie, et reprenant le dessus à mesure qu’elles passent, mais toujours faisant écumer l’eau sous son avant. Quoiqu’il eût diminué de voiles, sa rapidité était grande, et il ne s’était pas écoulé plus de dix minutes de-