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LE LAC ONTARIO.

les émotions passagères qui se peignent sur la physionomie aurait pu y trouver quelque chose d’étrange et de peu naturel. — Non, mon père, — ajouta-t-elle, — laissons aller les choses ; mais vous avez ma promesse solennelle.

— Je ne demande rien de plus, Mabel. Maintenant embrassez-moi, et que Dieu vous bénisse et vous protége ! Vous êtes le modèle des filles.

Mabel se jeta dans les bras de son père ; c’était la première fois de sa vie que cela lui arrivait, et elle ne put l’embrasser sans pleurer. Le cœur du vétéran fut profondément ému, et les larmes du père se mêlèrent à celles de la fille. Mais le sergent se le redressa bientôt comme s’il eût été honteux de cette faiblesse, et se dégageant doucement des bras de Mabel, il alla se coucher. Elle alla de son côté chercher le lit qui lui avait été préparé, et quelques minutes après on n’entendait plus d’autre bruit dans la hutte que le ronflement sonore du vieux soldat.


CHAPITRE XX.


« Errant au milieu des ruines, je trouvai près d’un vieux cadran couvert de mousse une rose de la solitude laissée sur sa tige pour indiquer que là fut un jardin. »
Campbell.

Mabel ne s’éveilla qu’assez long-temps après le lever du soleil. Son sommeil avait été paisible : elle s’était endormie satisfaite d’elle-même ; la fatigue contribua aussi à rendre son repos plus doux, et le bruit que firent ses compagnons plus matineux ne parvint pas jusqu’à son oreille. En peu d’instants sa toilette fut achevée, et elle se hâta d’aller respirer l’air du matin. Pour la première fois elle fut frappée de la beauté originale et de la profonde solitude de sa résidence actuelle si commune dans ce climat. C’était une de ces belles journées d’automne qu’on dénigre plutôt qu’on ne les apprécie ; sa vivifiante influence pénétrait