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pont pour empêcher les grandes ancres, et tout fut préparé pour les mouiller des que le moment l’exigerait. Ces préparatifs achevés, les manières de Jasper changèrent. Son activité forcée lui avait donné un air d’agitation affairée ; il prit alors un air calme, quoique toujours inquiet ; il quitta l’avant du bâtiment, que les lames balayaient chaque fois que le Scud plongeait en avant, ayant été obligé de travailler avec ses aides la moitié du temps le corps dans l’eau, et il s’avança vers l’arrière où l’on était plus à sec. Il y trouva Pathfinder, qui était debout près de Mabel et du quartier-maître. La plupart des autres individus qui se trouvaient à bord étaient encore sous le pont, les uns cherchant sur leurs lits quelque soulagement à leurs souffrances physiques, et les autres pensant un peu tard à leurs péchés. Pour la première fois peut-être depuis que sa quille avait touché l’eau de l’Ontario, la voix de la prière se fit entendre à bord du Scud.

— Jasper, — lui dit le guide, — je n’ai été d’aucune utilité ici ce matin, car, comme vous le savez, ce n’est pas ma nature d’être sur un bâtiment comme celui-ci ; mais s’il plaît à Dieu que la fille du sergent arrive à terre vivante, la connaissance que j’ai de la forêt pourra la conduire en sûreté jusqu’au fort.

— Le fort est bien loin, Pathfinder, — dit Mahel, car ils étaient si près, que ce que disait l’un était entendu par tous les autres, — et je crains qu’aucun de nous ne le revoie jamais.

— Le chemin de la forêt ne serait pas sans risque, Mabel, et nous ne pourrions aller en droite ligne, — répondit Pathfinder ; — mais quelques personnes de votre sexe en ont traversé de plus mauvais dans ces déserts. — Jasper, il faut que vous ou moi, ou tous les deux, nous prenions ce canot d’écorce, car c’est la seule chance qu’ait Mabel de pouvoir passer à travers les brisants.

Je ferais tout au monde pour sauver Mabel, — répondit Jasper avec un sourire mélancolique ; — mais il n’existe pas un seul homme, Pathfinder, qui puisse conduire un canot à travers ces brisants par un ouragan comme celui-ci. J’aurais de l’espoir en jetant l’ancre, car c’est par ce moyen que nous avons une fois sauvé le Scud dans un danger presque aussi grand.

— Mais s’il faut jeter l’ancre, Jasper, — dit le sergent, pourquoi ne pas le faire sur-le-champ ? Chaque pied que nous fait perdre la dérive nous servirait d’autant quand nous serons probablement à chasser sur nos ancres.