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LE LAC ONTARIO.

Il avança le bout d’un tronc d’arbre pour lui servir de siège, lui présenta une tranche délicieuse de venaison, remplit son gobelet d’une eau pure puisée dans une source, et s’asseyant en face d’elle, il fit du chemin dans son estime par la manière franche et aimable avec laquelle il lui donna des soins ; hommage qu’une femme désire toujours de recevoir, mais qui n’est jamais si flatteur ni si agréable que lorsqu’il est offert par la jeunesse à la jeunesse, par le sexe le plus fort au sexe le plus doux. Comme la plupart de ceux qui passent leur temps loin de la société du beau sexe, le jeune Western fut ardent, sincère et obligeant dans toutes ses attentions ; et quoiqu’il y manquât ce raffinement de convention dont Mabel ne remarqua peut-être pas l’absence, elles avaient ces qualités attrayantes qui le remplacent bien suffisamment. Laissant ces deux jeunes gens sans expérience, et sans autres maîtres que la nature, faire connaissance ensemble, plutôt par leurs sensations que par l’expression de leurs pensées, nous nous occuperons de l’autre groupe, dans lequel Cap, avec cette aisance à prendre soin de lui-même qui ne le quittait jamais, était déjà devenu un des principaux acteurs.

Tous quatre avaient pris place autour d’un grand plat de bois, dont l’usage devait être commun, et qui contenait des tranches de venaison grillée ; la conversation se ressentait naturellement du caractère différent de ceux qui y prenaient part. Les Indiens étaient silencieux et fort occupés ; l’appétit des aborigènes Américains pour la venaison paraissait être insatiable. Les deux hommes blancs étaient plus communicatifs, et chacun d’eux montrait de l’opiniâtreté dans ses opinions. Mais comme cet entretien servira à faire connaître au lecteur certains faits qui pourront rendre plus claire la narration qui va suivre, il est à propos de le rapporter.

— Vous devez sans doute trouver de la satisfaction à vivre comme vous le faites, monsieur Pathfinder, — dit Cap, quand l’appétit des voyageurs fut assez rassasié pour qu’ils commençassent à chercher les meilleurs morceaux. — Elle offre quelques-unes des chances que nous aimons, nous autres marins ; et si les nôtres sont toutes eau, les vôtres sont toutes terre.

— Nous avons aussi de l’eau dans nos voyages et nos marches, nous autres hommes des frontières ; nous manions la rame et la javeline presqu’autant que le mousquet et le couteau de chasse.

— Oui, mais maniez-vous les bras des vergues, les boulines,