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quatre lits, et il avait l’avantage d’avoir de petites fenêtres pour y admettre l’air et le jour. Il était toujours destiné aux femmes quand il s’en trouvait à bord, et comme il n’était occupé alors que par Mabel et sa compagne, il était assez spacieux pour qu’elles s’y trouvassent à l’aise. La grande chambre offrait plus de place et était éclairée par le haut. C’était là que logeaient le quartier-maître, le sergent, Cap et Jasper, Pathfinder se plaçant dans telle partie du bâtiment que bon lui semblait, la chambre des femmes exceptée. Les caporaux et les soldats occupaient l’espace situé sous la grande écoutille, et l’équipage était logé comme de coutume sur l’avant du bâtiment. Quoique le cutter ne fût pas tout-à-fait du port de cinquante tonneaux, il y avait amplement place pour tous ceux qui étaient à bord, car il aurait pu au besoin recevoir trois fois le même nombre d’hommes.

Dès que Mabel eut pris possession de sa chambre, réellement jolie et commode, elle ne put s’empêcher de faire la réflexion agréable que c’était spécialement pour elle que Jasper avait pris tant de soin à la préparer. Remontant ensuite sur le pont, elle y trouva tout en mouvement. Les hommes couraient çà et là cherchant leurs havresacs et leurs autres effets : mais l’habitude et la méthode rétablirent bientôt l’ordre, et le silence qui succéda devint presque imposant, car il se rattachait à l’idée d’aventures à courir et de préparatifs pour s’y exposer.

L’obscurité commençait alors à rendre indistincts les objets qui étaient sur le rivage. La terre n’offrait aux yeux qu’une masse noire formée par les contours de la forêt, et qu’on ne distinguait du ciel que parce que le firmament était un peu moins sombre. Cependant les astres commencèrent bientôt à paraître avec leur lustre tranquille ordinaire, et amenèrent avec eux le sentiment de repos qui accompagne communément la nuit. Cette scène avait quelque chose d’agitant et de calmant en même temps, et Mabel éprouvait cette double influence. Pathfinder était à côté d’elle, appuyé, suivant sa coutume, sur sa longue carabine, et elle crut, malgré l’obscurité croissante de la nuit, pouvoir distinguer des lignes creusées sur ses traits plus profondément que d’ordinaire par ses réflexions.

— Des expéditions comme celle-ci ne peuvent être une grande nouveauté pour vous, Pathfinder, — lui dit-elle, — mais je suis étonnée de voir les soldats tellement silencieux et pensifs.

— On apprend cela en faisant la guerre aux Indiens. Vos mi-