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LE LAC ONTARIO.

rent un chemin à travers ce labyrinthe compliqué, et gagnèrent le bois en se dirigeant du côté convenable. Il ne fallut pour cela qu’un coup d’œil à Arrowhead ; mais le vieux Cap, avant de se fier à la sombre obscurité des bois, reconnut la situation d’où partait la fumée par le moyen d’une boussole de poche.

— Cette manière de gouverner un navire à vue de nez, Magnet, peut convenir assez bien à un Indien ; mais un bon marin connaît la vertu de l’aiguille aimantée, — dit Cap en marchant sur les talons du léger Tuscarora. — L’Amérique n’aurait jamais été découverte, croyez-en ma parole, si Colomb n’avait eu que des narines. — Ami Arrowhead, avez-vous jamais vu une machine comme celle-ci ?

L’Indien se retourna, jeta un regard sur la boussole que Cap tenait de manière à diriger sa marche, et répondit : — C’est l’œil d’une face-pâle : le Tuscarora voit dans sa tête, Eau-Salée ; — c’est ainsi que l’Indien nommait le vieux marin. Tout œil à présent, — point de langue.

— Il veut dire, mon oncle, que nous devons garder le silence. Il se méfie peut-être des gens que nous allons rencontrer.

— Oui, c’est la mode des Indiens pour aller à leur poste. Vous voyez qu’il a examiné l’amorce de son mousquet, et je ne ferai pas mal de jeter un coup d’œil sur celle de mes pistolets.

Sans montrer aucune alarme de ces préparatifs auxquels elle s’était accoutumée par son long voyage dans le désert, Mabel marchait d’un pas aussi léger et aussi élastique que celui de l’Indien, et suivait de près ses deux compagnons. Pendant le premier demi-mille, on ne prit aucune autre précaution qu’un silence rigoureux ; mais quand ils arrivèrent plus près de l’endroit où ils savaient qu’un feu était allumé, il devint nécessaire d’en prendre davantage.

Comme c’est l’ordinaire, la vue n’était arrêtée sous les branches dans la forêt que par les grands troncs droits des arbres. Tout ce qui sentait l’effet de la végétation avait cherché à s’élever vers l’air et la lumière ; et sous ce dais de feuillage, on marchait, en quelque sorte, comme sous une immense voûte naturelle soutenue par des myriades de colonnes rustiques. Cependant ces colonnes ou ces arbres servaient souvent à cacher l’aventurier, le chasseur ou l’ennemi ; et Arrowhead, tout en s’approchant rapidement de l’endroit où ses sens exercés et presque infaillibles lui disaient que les étrangers devaient être, marchait graduellement