marquer que cet officier, qui était un Écossais, nommé Muir, rendait au sergent des visites plus fréquentes qu’il n’y avait été accoutumé : un sourire ou une plaisanterie en l’honneur de la fille du sergent, — étaient pourtant tout ce qu’on se permettait ; mais — Mabel Dunham — devint un toast que l’enseigne et même le lieutenant ne dédaignaient pas de proposer.
À la fin de la semaine, le commandant de la garnison, le major Duncan de Lundie, un soir, après que la retraite eut été battue, envoya chercher le sergent Dunham, en lui donnant à entendre qu’il s’agissait d’une affaire qui exigeait une entrevue personnelle. Le major demeurait dans une hutte mobile qui, étant placée sur des roulettes, pouvait se transporter dans telle partie de la cour du fort qu’il le jugeait à propos. Elle en occupait alors presque le centre, et ce fut là que le sergent trouva son officier supérieur. Il fut admis en sa présence sans aucun délai, et sans être obligé de faire le pied de grue dans une antichambre. Dans le fait il y avait peu de différence entre les logements des officiers et ceux des soldats, si ce n’est que les premiers étaient plus spacieux ; de sorte que Mabel et son père étaient presque aussi bien logés que le commandant.
— Entrez, sergent, entrez, mon bon ami ! — dit Lundie d’un ton cordial, tandis que le subalterne se tenait dans une attitude respectueuse à la porte d’une pièce servant de bibliothèque et de chambre à coucher dans laquelle on l’avait introduit ; — entrez et asseyez-vous sur cette escabelle. Je vous ai fait venir pour une discussion qui n’aura rapport ni aux revues ni aux feuilles de paie. Il y a bien des années que nous sommes camarades, et un temps si long doit compter pour quelque chose, même entre un major et son sergent d’ordonnance, entre un Écossais et un Yankee. Asseyez-vous, vous dis-je. — La journée a été belle, sergent.
— Oui, sans doute, major Duncan, — répondit Dunham, qui, tout en obéissant à l’ordre qu’il avait reçu de s’asseoir, avait trop d’expérience pour oublier le degré de respect qu’il devait montrer à son commandant ; — la journée a été très-belle, et nous pouvons en espérer encore de semblables en cette saison de l’année.
— Je le désire de tout mon cœur. Tout promet une belle récolte ; et vous verrez que les soldats du cinquante-cinquième sont presque aussi bons fermiers que bons soldats. Je n’ai jamais