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de le faire de manière à ce que la loi ne pût en prendre connaissance. Quoique sa vie fût un tissu des vices les plus bas et les plus dangereux pour la société, jamais on n’avait à lui reprocher aucun de des délits qui attirent ordinairement l’attention de douze jurés. Cette circonstance l’élevait à ses yeux assez au-dessus des pécheurs moins prudents, pour lui donner le droit de parler à son ci-devant compagnon comme il venait de le faire. Mais l’angoisse du coupable était au comble, et cette attaque brutale ne pouvait l’accroître. Il fit seulement un geste pour faire éloigner de lui ce sycophante démagogue, et continua à invoquer la merci des deux capitaines. Mais, en ce moment, Paul s’approcha de l’éditeur du Furet Actif, et lui ordonna d’un ton ferme, quoique à voix basse, de sortir de la chambre.

— Je prierai pour vous, capitaine Truck ; je serai votre esclave ; je ferai tout ce que vous m’ordonnerez, si vous ne me livrez pas, s’écria le coupable, se tordant les bras dans son agonie. Ô capitaine Ducie, vous êtes un noble Anglais, ayez pitié de moi.

— Il faut que je charge de ce service des subordonnés, dit le capitaine anglais une larme à l’œil. Permettrez-vous, capitaine Truck, qu’un détachement de soldats de marine emmène ce malheureux de votre bord ?

— Peut-être sera-ce le meilleur parti, car il ne cédera qu’à la force. Je ne vois pas d’objection à cela, monsieur John Effingham ?

— Pas la moindre, capitaine. Votre but est de débarrasser votre bâtiment d’un criminel ; que ceux parmi lesquels il a commis le crime servent d’agents pour en assurer la punition !

— Oui, oui ; c’est ce que Vattel appelle la politesse des nations. Capitaine Ducie, je vous prie de donner vos ordres.

L’officier anglais avait prévu quelque difficulté, et en envoyant son midshipman à la corvette, il lui avait donné ordre d’en ramener un détachement de soldats de marine, commandés par un caporal. Ils étaient arrivés, et la chaloupe restait à quelques toises du Montauk, par respect pour un bâtiment étranger, ce que le capitaine Truck vit avec plaisir, car il était remonté sur le pont avec tous les autres aussitôt que l’affaire avait été arrangée. Au premier ordre que leur donna leur commandant, les soldats de marine montèrent à bord du paquebot, et ils descendirent ensuite sous le pont pour aller chercher leur prisonnier.

Sandon était resté seul dans le salon de miss Effingham ; mais, dès qu’il s’était trouvé en liberté, il était retourné dans sa chambre. Pendant que les soldats arrivaient, le capitaine Truck descendit dans sa chambre, y resta un instant, passa dans la grande chambre, et