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c’est une question délicate, et qui doit être décidée par les grandes autorités.

Les vergues furent alors orientées de l’avant, et le bâtiment serra le vent de manière à gouverner un peu au nord, de l’établissement de Bains à Lang-Branch. Sans ce changement soudain de route, le paquebot aurait avancé en droite ligne vers la corvette, et aurait probablement passé sans être reconnu, tant les mâts, les vergues et les voiles du bâtiment danois l’avaient changé. Tant qu’il avait continué à voguer vers l’Écume, personne à bord de ce bâtiment n’avait eu le moindre soupçon ; mais le mouvement étrange qu’il fit tout à coup mit son flanc en vue, et il fut reconnu au même instant. La corvette fit servir son grand hunier, ses voiles prirent le vent, et elle suivit la même route que le paquebot. Les deux bâtiments étaient alors à environ dix milles de la terre, l’Écume un peu en avant, mais à une bonne lieue sous le vent. La corvette ne tarda pourtant pas à virer vent devant, et elle gouverna alors vers la côte. Cette manœuvre mit les deux bâtiments presque par le travers l’un de l’autre ; la corvette étant à un mille et plus sous le vent, et à environ six milles de la terre. Tous ceux qui étaient à bord des deux bâtiments virent alors combien la corvette et était meilleure voilière, car elle avançait de deux pieds, pendant que le paquebot en gagnait un.

L’histoire de cette rencontre, à laquelle le capitaine Truck s’attendait si peu, était fort simple. Après la fin de l’ouragan, la corvette, qui n’avait éprouvé aucune avarie, avait longé la côte d’Afrique, en suivant aussi bien qu’elle l’avait pu la route supposée du paquebot. N’ayant pas réussi à le découvrir, elle gouverna vers New-York. En arrivant à Sandy-Hook, elle prit un pilote et s’informa si le Montauk était arrivé. Ayant appris du pilote que ce bâtiment n’avait pas encore paru, elle envoya un officier dans la ville pour avoir une conférence avec le consul anglais. Au retour de cet officier, elle s’éloigna de la côte et commença à croiser au large. Il y avait alors huit jours qu’elle était occupée ainsi, revenant le matin près de la côte, courant des bordées dans les environs de la barre jusqu’au soir, et reprenant alors le large pour croiser toute la nuit. Quand le Montauk l’avait aperçue, elle était en panne pour recevoir des provisions de la ville.

Les passagers du Montauk venaient de finir leur déjeuner, quand M. Leach vint annoncer que le brassage diminuait à chaque instant, et qu’il serait indispensable, dans quelques minutes, de changer de route ou de mouiller. Le capitaine monta sur le pont avec les passagers, et il vit la terre à moins d’un mille en face, tandis que la cor-