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bien gagné un bon souper et une bonne nuit, et qu’ils auraient l’un et l’autre.

Les passagers, qui, en général, n’offraient leurs services que lorsqu’il s’agissait de virer au cabestan, se chargèrent de faire la garde pendant la nuit, et comme on pouvait faire montre d’un assez grand nombre d’armes à feu, quoiqu’on eût fort peu de munitions, on ne craignait guère d’être attaqué par les Arabes. Comme on s’y attendait, la nuit se passa tranquillement, et chacun, en se levant au point du jour, avait puisé de nouvelles forces dans le sommeil.

Cependant le retour de la lumière amena sur le rivage une foule d’Arabes ; car le dernier ouragan, dont la violence avait été extraordinaire, et la nouvelle de deux bâtiments échoués, que les dromadaires avaient déjà répandue bien loin, avaient réuni sur la côte une troupe que le nombre seul suffisait pour commencer à rendre formidable. Le bâtiment danois avait été complètement pillé, et le pillage avait produit sur ces barbares avides le même effet que le sang, dit-on, produit sur le tigre. L’appétit leur était venu en mangeant, et, dès que le soleil parut, ceux qui étaient à bord du Montauk virent parmi les Arabes des signes qui annonçaient une disposition générale à faire une nouvelle tentative contre le paquebot.

Heureusement la partie la plus laborieuse du travail était terminée, et le capitaine Truck, plutôt que de risquer un autre combat contre des forces devenues si formidables, résolut de prendre à bord le reste des mâts et des vergues, et de conduire son bâtiment au-delà du récif sans attendre qu’il fût complètement gréé. Le premier ordre qu’il donna quand tout le monde fut réuni sur le pont, fut donc que les embarcations allassent lever les ancres à jet et celle d’affourcher, et qu’on fît tous les autres préparatifs nécessaires pour partir. Comme l’opération de lever les ancres était un travail long et pénible, il était midi quand elles furent hissées à bord et mises à leur poste. Toutes les vergues étaient alors gréées, mais pas une voile n’était enverguée.

Pendant que l’équipage était à dîner, le capitaine Truck se promena partout, examinant chaque étai et chaque hauban. Il découvrit quelques négligences causées par la précipitation ; mais au total il fut satisfait, quoiqu’il vît que la présence des Arabes avait été cause qu’il y aurait quelques bons coups de palans à donner aussitôt qu’on serait hors de danger, et qu’il faudrait faire examiner les amarrages. Cependant ce qui avait été fait suffirait par un temps passable, et il était trop tard pour en faire davantage.

Les vents alisés étaient revenus, ils soufflaient de manière à faire