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donner quelques-unes des consolations de la religion, dans cette triste occasion.

— Il y a M. Effingham et M. John Effingham, capitaine, et ils sont plus âgés et plus instruits que moi.

— Cela ne suffit pas. Tout ce qu’ils pourront offrir sera sans doute très-convenable, mais nous avons un devoir à remplir à l’égard de notre bâtiment. Les officiers d’un paquebot ne sont pas des maquignons transportant des chevaux de la Rivière dans les îles ; ce sont des hommes sages et discrets, et il convient qu’ils sachent montrer dans l’occasion quelle éducation ils ont reçue, et de quelle étoffe ils sont faits. J’attends donc de vous, Leach, que vous me soutiendrez, dans cette fâcheuse circonstance, comme vous l’avez fait ce matin dans le combat.

— Je tâcherai, capitaine, de ne pas faire honte au Montauk ; mais il est probable que M. Lundi professe la religion anglicane, et vous et moi nous appartenons à la plate-forme de Saybrook.

— Ah ! diable ! je l’avais oublié. Mais qu’importe ? la religion est la religion, après tout, anciennes ou nouvelles formes, et je doute fort qu’un homme si près de voir couper ses amarres y regarde de si près. Le grand point, c’est la consolation, et il faut que nous lui en donnions de façon ou d’autre, quand le moment convenable sera arrivé. — Et maintenant, monsieur Leach, veillez à ce que notre monde se dépêche ; que tout soit prêt sur l’avant, et le grand mât en place avant que le soleil soit couché, ou pour parler plus littéralement, avant qu’il soit en bas. — Car le capitaine Truck, en véritable habitant de la Nouvelle-Angleterre, employait invariablement un provincialisme qui est devenu si général en Amérique.

Le travail se continua avec ardeur ; chacun désirait tirer promptement le paquebot d’une position rendue aussi critique par la proximité des Arabes que par la possibilité d’un mauvais temps. Le vent était variable, comme c’est l’ordinaire dans le voisinage des vents alisés, et, quoiqu’il continuât à être léger, il venait quelquefois de la mer. Comme le capitaine l’avait espéré, quand la nuit suspendit les travaux, la vergue de misaine et celle du petit hunier étaient en place ; le mât de perroquet était en clef ; et, à l’exception des voiles, le bâtiment était en bon ordre sur l’avant. La besogne était moins avancée sur l’arrière ; cependant à l’aide des passagers, qui continuaient à prêter leur aide au besoin, les deux mâts avaient été mis en place, quoiqu’on n’eût pas eu le temps de les gréer. Les hommes de l’équipage offrirent d’y travailler par quarts toute la nuit ; mais le capitaine ne voulut pas y consentir, et il déclara qu’ils avaient