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Personne ne songea plus à M. Dodge ni à ses scrupules, et l’on fit avec promptitude et prudence tous les préparatifs pour l’attaque. Il fut décidé que Ma Effingham et son domestique resteraient sur la chaloupe du Montauk avec les femmes, et comme il était nécessaire d’y laisser quelqu’un qui connût la navigation, il fit tirer au sort ses deux lieutenants pour décider lequel y resterait. Le sort tomba sur le second, qui se soumit d’assez mauvaise grâce à sa bonne fortune.

On mit en pièces un buste de Napoléon, et l’on en fit quelques balles de plomb aussi rondes qu’il fut possible ; on coupa le reste en morceaux en forme de mitraille, et on les mit dans des sacs de toile ; on ouvrit le seul baril de poudre qu’on possédât, on coupa une ou deux chemises de flanelle et l’on prépara des gargousses ; on distribua ensuite des munitions à tout l’équipage, et M. Sharp examina si toutes les armes étaient en bon état ; on retira la pièce de canon de la chaloupe du Montauk, et on la plaça sur un caillebotis sur l’avant de celle du bâtiment danois ; on en retira les voiles et leur gréement, qu’on plaça sur le radeau, et quand il y eut placé le nombre d’hommes convenable, le capitaine en donna le commandement à Paul.

Il distribua aussi le monde nécessaire sur les trois autres embarcations. Le capitaine prit le commandement du cutter, et donna celui des deux canots à M. Leach et à John Effingham. M. Dodge se crut obligé de passer comme volontaire sur la chaloupe danoise, où Paul avait déjà pris son poste ; mais ce fut avec une répugnance qui ne put échapper aux remarques de quiconque prit la peine de l’observer. M. Sharp et M. Lundi suivirent le capitaine, et le faux sir George Templemore accompagna M. Leach. Ces arrangements terminés, tous attendirent avec impatience que le vent et le courant les eussent conduits jusqu’au récif, dont on voyait déjà distinctement les rochers en montant sur les bancs de rameurs.


CHAPITRE XXVI.


Écoutez ! n’ai-je pas entendu le son de la trompette ? L’âme des combats s’éveille en moi ; le destin des siècles et des empires dépend de ce moment terrible.
Messinger



Les deux chaloupes voguaient encore bord à bord, et Ève se montra à une fenêtre du rouffle, en face de l’endroit ou Paul était assis. Elle était aussi pâle que lorsqu’elle avait appris la première nouvelle de l’arrivée des Arabes, et ses lèvres tremblaient.