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peut-être été celui qui aurait dû s’en charger ; mais nous avons acquis la preuve que les Arabes sont maîtres du bâtiment danois, et si le capitaine Truck leur a échappé, c’est dans des circonstances qui admettent à peine la possibilité qu’il soit dans le voisinage de la terre. Les barbares doivent être répandus sur toute la côte et la surveiller, et quiconque y passerait ne pourrait éviter d’être vu.

— Mais ne pourriez-vous avancer dans l’intérieur ? demanda vivement miss Effingham.

— Pour quel motif ? Me séparer de ceux qui ont été mes compagnons d’infortune, pour mourir de faim dans un désert, ou pour tomber dans les mains d’une autre tribu d’Arabes ? Il est de notre intérêt à tous de ne pas nous séparer, et de laisser ceux qui sont déjà sur la côte devenir nos maîtres : le butin qu’ils feront sur les deux bâtiments peut les disposer à être moins exigeants à l’égard de leurs prisonniers.

— De leurs esclaves ! murmura John Effingham.

M. Effingham baissa la tête sur sa fille et la serra dans ses bras, comme pour la mettre à l’abri de tous les fléaux du désert.

— Comme nous pouvons être séparés dès que nous serons captifs, reprit Paul Blunt, il serait bon d’adopter un plan général de conduite, et de nous concerter sur ce que nous devrons dire, afin de faire sentir aux Arabes qu’il est de leur intérêt de nous conduire le plus tôt possible dans les environs de Mogador, afin d’y recevoir notre rançon.

— Peut-il y avoir quelque chose de mieux que la sainte vérité ? s’écria Ève. Non, non, n’offensons pas Dieu qui nous châtie, en concevant une pensée, en prononçant un seul mot qui ait pour but de tromper.

— Je ne dis pas que nous ayons besoin de tromper, miss Effingham ; mais en connaissant bien les faits qui auront probablement le plus d’influence sur les Arabes, nous saurons sur quoi il convient d’appuyer principalement. Nous devons avant tout chercher à leur faire comprendre que le Montauk n’est pas simplement un bâtiment de commerce, fait dont leurs propres yeux peuvent les assurer ; et que nous sommes, non des marins, mais des passagers disposés à les récompenser de leur modération et de leurs bons traitements.

— Je crois, Monsieur, dit Nanny Sidley, les larmes aux yeux et levant la tête, sans quitter la place qu’elle occupait ; je crois que si ces gens-là savaient combien miss Ève est aimée, ils seraient portés à la respecter comme elle le mérite, et ce serait du moins modérer le vent pour l’agneau qui vient d’être tondu.