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cation constante avec une autre troupe, qui était probablement cachée par une suite de monticules de sable qui bornaient la vue à l’orient, car tous allaient et venaient de ce côté. Après avoir vu ses deux envoyés entrer dans le camp, il laissa une sentinelle sur le rivage et retourna sur le bâtiment pour accélérer la besogne importante dont on s’y occupait.

M. Lundi se montra le plus entendu des deux ambassadeurs, dès qu’ils eurent une fois commencé à exécuter leur mission. C’était un homme qui était tout nerfs, et qui avait trop peu d’imagination pour se figurer des dangers quand ils n’étaient pas très-distincts, et il avait une grande confiance dans la vertu pacifique de la caisse de liqueurs. Quand ils furent près des tentes, un Arabe s’avança à leur rencontre, et, quoique toute conversation fût impossible, M. Lundi, à force de gestes et en répétant plusieurs fois le seul mot scheik, réussit à se faire conduire, avec M. Dodge, devant ce personnage.

On a si souvent fait la description des habitants du désert, que je supposerai que mes lecteurs les connaissent, et je continuera ma relation comme s’il s’agissait de chrétiens. On a écrit bien des choses sur l’hospitalité des Arabes ; s’il y a quelque chose de vrai dans ces récits, on ne peut guère l’appliquer aux tribus qui fréquentent les côtes de l’Océan Atlantique : l’habitude de piller les bâtiments naufragés paraît y avoir produit les mêmes effets que dans certaines parties d’Europe bien connues ; mais un bâtiment protégé par quelques hommes naufragés et épuisés de fatigues, et un navire défendu par une troupe armée aussi nombreuse que celle que commandait le capitaine présentaient des objets tout différents à la rapacité de ces barbares. Ils connaissaient le grand avantage que leur donnait la circonstance qu’ils se trouvaient sur leur propre terrain, et se contentaient d’attendre les événements plutôt que de risquer un combat dont le résultat était douteux. Plusieurs d’entre eux avaient été à Mogador et dans d’autres ports, ou ils s’étaient formé une idée assez passable du pouvoir des bâtiments européens ; et comme ils voyaient que les hommes qui étaient à travailler sur le navire échoué n’avaient aucun moyen d’en emporter la cargaison, ce qui était le principal objet de leur cupidité, la curiosité et la prudence se joignant à certains plans qui avaient déjà été concertés entre leurs chefs, les maintenaient en repos, du moins pour le moment.

Ces Arabes n’étaient pas assez ignorants pour ne pas comprendre que quelque autre navire devait être dans les environs, et ils avaient envoyé de tous côtés le long de la côte pour s’assurer de ce fait avant de prendre leurs mesures définitives, car le scheik lui-même avait des