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moins de répugnance qu’auparavant à leur lâcher mon coup de pistolet ou de fusil.

— J’ai entendu dire que les musulmans ne boivent jamais de liqueurs fortes, dit sir George Templemore, — et ; dans ce cas, notre offrande sera méprisée. D’ailleurs, il y a la difficulté de la prise de possession. Si ces Arabes sont ceux qui sont déjà venus sur ce bord, ils peuvent ne pas nous savoir beaucoup de gré de leur offrir une si faible partie de ce qu’ils peuvent regarder comme leur appartenant déjà. Il est certain que si quelqu’un m’offrait mes pistolets damasquinés, pour qu’il lui fût permis d’emporter mon assortiment de rasoirs ou ma toilette portative des Indes, j’avoue que je ne lui en aurais pas beaucoup d’obligation.

— Le cas est parfaitement posé, sir George, et je serais complètement de votre opinion, si je ne pensais que ces Arabes peuvent réellement être mollifiés par quelques verres de liqueur. Si j’avais un ambassadeur convenable à leur envoyer avec l’offrande, j’adopterais sur-le-champ le plan de M. Lundi.

Après un moment d’hésitation. M. Lundi s’offrit avec courage pour être l’un des deux ambassadeurs qui porteraient l’offrande propitiatoire aux Arabes ; car il avait assez de pénétration pour s’apercevoir qu’il était peu probable que ces hommes songeassent à le retenir, quand ils savaient qu’il se trouvait si près d’eux une force armée considérable et assez déterminée pour courir le risque d’un combat. Tout ce qu’il demandait, c’était d’avoir un compagnon ; et le capitaine Truck fut tellement frappé de cet esprit de prouesse, qu’il déclara sur-le-champ qu’il l’accompagnerait lui-même. Mais ses deux lieutenants et tout l’équipage s’y opposèrent fortement, quoique avec respect. On sentait trop l’importance d’un tel commandant pour consentir à ce qu’il s’exposât ainsi sans nécessité, et l’on ne voulut même permettre à aucun de ses officiers de courir le même risque à sa place. Ils pourraient combattre, si bon leur semblait, mais ils n’iraient pas se jeter ainsi dans la gueule du lion sans aucun moyen de résistance.

— Peu importe, dit M. Lundi ; je n’aurais pas été fâché d’avoir un officier pour compagnon ; mais je suis sûr qu’aucun de ces braves gens ne refusera de passer une heure à vider une bouteille avec un scheik arabe. Qu’en dites-vous, mes amis ? quelqu’un de vous veut-il m’accompagner ?

— Moi ! — Moi ! — Moi ! s’écrièrent en même temps une douzaine de voix.

— Non, non, non ! s’écria le capitaine. J’ai besoin de tout mon