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nous verrions qui riposterait le mieux. — Puis-je vous demander si vous savez par hasard quel est aujourd’hui le jour de la semaine ?

— Sans contredit, commandant, car ce sera demain dimanche, et je pense que c’est bien dommage que nous ne puissions solliciter les prières de l’église en notre faveur.

— Si demain est dimanche, ce doit être aujourd’hui samedi, monsieur Saunders, à moins que ce maudit ouragan n’ait dérangé le calendrier.

— Tout naturellement, capitaine, et votre remarque est fort juste. — Tout le monde convient qu’il n’y a pas de meilleur navigateur que le capitaine Truck.

— Cela peut être vrai, mon brave garçon ; mais je n’en suis pas moins diablement éloigné de ma route en ce moment, ici, presque dans le sein de votre aimable famille. Mais si c’est aujourd’hui samedi, il y aura un samedi soir avant qu’il soit longtemps ; et, songez-y bien, il faut que nous portions le toast d’usage : « À nos maîtresses et à nos femmes. » Quoique je n’aie moi-même ni l’une ni l’autre, je sens la nécessité d’avoir quelque chose qui puisse m’égayer, pour me mettre en état de songer à l’avenir.

— Comptez sur moi, capitaine. Je suis charmé de vous entendre parler ainsi ; car je pense qu’un bâtiment n’est jamais plus respectable et plus en bon ordre que lorsqu’on y célèbre tous les anniversaires. Vous aurez ce soir une compagnie choisie et agréable, commandant.

Après cette dernière remarque, Saunders se retira pour aller conférer avec Toast sur ce sujet ; et le capitaine s’occupa à donner à M. Leach ses instructions pour la nuit. Le fait était que le Montauk offrait alors un spectacle bien fait pour inspirer de la mélancolie à un marin ; car, à la seule voile régulière qui lui restât, celle de misaine, on avait ajouté une bonnette basse, très-imparfaitement gréée, et qui n’aurait pu résister à une brise tant soit peu forte, tandis qu’un mât de hune de fortune soutenait une voile de perroquet qu’on ne pouvait porter que par un vent largué. Il est vrai qu’on faisait sur l’arrière des préparatifs d’une nature plus durable. Le tronçon du grand mât avait été coupé au ras de l’entre-pont, où l’on avait pratiqué une emplanture pour y placer un mât de hune de rechange, qui était sur le pont tout gréé. On avait préparé des bigues pour le mâter ; mais, la nuit approchant, on suspendit ce travail, et l’on employa l’équipage à gréer les vergues, à enverguer les voiles, et à disposer les autres esparres dont on comptait se servir, remettant au lendemain matin la dernière opération, celle du mâtage.

— Nous aurons probablement une nuit tranquille, monsieur Leach,