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suite de la contrebande, et par une attaque assez vive contre les taxes en général. J’ai dit et écrit quelques bonnes choses pendant ma vie, comme mes amis me l’ont juré d’une telle manière que ma modestie naturelle ne peut même se refuser à le croire ; mais on excusera ma faiblesse si j’ajoute que cette lettre à lord Pledge valait tout ce que j’aie jamais dit ou écrit. Le dernier alinéa surtout était décidément le trait moral le mieux tourné qui soit jamais sorti de ma bouche ou de ma plume.

La quatrième missive était de l’intendant de mon domaine d’House-Holder. Il me parlait de la difficulté de faire rentrer les loyers, difficulté qu’il attribuait entièrement au bas prix des grains ; il disait que les baux de quelques fermes étaient sur le point d’expirer, et craignait que les cris inconsidérés qu’on poussait contre les lois sur les grains n’empêchassent de les louer au même prix. Il était important pour les propriétaires d’avoir l’œil ouvert sur ce sujet, car tout changement matériel dans le système actuel ferait baisser les loyers, dans tous les comtés d’agriculture, de trente pour cent tout au moins. Il poussait une bonne botte contre les sectateurs des lois agraires, parti qui commençait à se montrer dans la Grande-Bretagne ; et, par une tournure fort ingénieuse, il finissait par démontrer que l’intérêt des propriétaires et le soutien de la religion protestante étaient indissolublement unis. Il y avait aussi un vigoureux appel au sens commun sur les dangers que le peuple avait à craindre de lui-même, et il traitait ce sujet d’une telle manière, que, s’il y eût donné un peu plus d’étendue, c’eût été une excellente homélie sur les droits de l’homme.

Je crois que je méditai une bonne heure sur le contenu de cette lettre. John Dobbs, qui me l’avait écrite, était un homme aussi droit qu’estimable, et je ne puis qu’admirer la connaissance surprenante des hommes, qu’on y voyait briller à chaque ligne. Il était clair qu’il fallait faire quelque chose, et enfin je me déterminai à prendre le taureau par les cornes, et à écrire à M. Huskisson, ce qui était le plus sûr moyen d’arriver à la source du mal. Il était le parrain politique de toutes les nouvelles idées sur notre commerce avec les étrangers, et en lui mettant devant les yeux, sous un fort point de vue, les suites fatales de ses principes portés à l’extrême, j’espérai pouvoir faire quelque chose pour les propriétaires d’immeubles, qui sont les nerfs d’un état,