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royaume uni de Grande-Bretagne et d’Irlande John Goldencalf d’House-Holder-Hall, écuyer. » — Sir John Goldencalf, j’ai l’honneur de boire à votre santé et à votre bonheur, s’écria Anna, les joues vermeilles comme l’aurore, en mouillant ses lèvres dans une liqueur moins semblable qu’elles au rubis. Francis, versez-vous un verre de vin, et buvez à la santé du nouveau baronnet.

Le vieux sommelier obéit de fort bonne grâce, et courut faire part de cette nouvelle aux autres domestiques.

— Eh bien ! John, voici un nouveau droit que la société a sur vous, quelque droit que vous puissiez avoir sur la société.

Je me sentis satisfait, parce qu’elle était satisfaite, et je crois que mes yeux ne lui avaient jamais exprimé plus de tendresse qu’en ce moment. Je voyais aussi avec plaisir que lord Pledge n’était pas sans reconnaissance. Cependant il trouva encore l’occasion de me donner à entendre que je devais principalement cette faveur à l’espérance.

— Après tout, chère Anna, le nom de lady Goldencalf ne sonnerait pas mal.

— Porté par une seule personne, sir John, me répondit-elle en souriant et en rougissant ; mais il ne peut se partager entre cent.

À ces mots, fondant encore en larmes, elle sortit de l’appartement.

— Quel droit ai-je d’émouvoir ainsi la sensibilité de cette aimable et excellente créature ? me dis-je à moi-même ; il est évident que ce sujet la chagrine, et elle n’est pas en état de le discuter. Je dois soutenir mon caractère d’homme, de baronnet à présent ; non, jamais je ne lui parlerai comme je l’ai fait aujourd’hui.

Le lendemain je pris congé du docteur Etherington et de sa fille, en déclarant mon intention de voyager pendant une couple d’années. Le bon recteur me donna d’excellents avis, m’exprima sa confiance en ma discrétion, et me serra la main en me priant de ne pas oublier que j’aurais toujours mon appartement au presbytère. Quand feus fait mes adieux au père, j’allai, le cœur gros, prendre congé de la fille. Elle était dans la petite chambre à déjeuner, — cette chambre si chérie ! Je la trouvai pâle et timide, mais respirant une douce sérénité. Dans le fait, il ne fallait pas peu de chose pour troubler cette qualité céleste. Si elle