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l’apprit lui-même, l’agent spécial du propriétaire de ce bourg dépendant. Il me dit qu’il était venu à House-Holder dans l’attente de vendre ce bourg à lord Pledge, le candidat ministériel que je venais d’entendre pérorer. Mais les guinées nécessaires pour conclure l’affaire n’étaient pas arrivées, comme on l’avait porté à l’espérer, et le marché avait été malheureusement rompu à l’instant où il était de la plus grande importance de savoir à qui appartenaient légitimement les électeurs indépendants de ce bourg.

— Cependant Sa Seigneurie a bien fait les choses, ajouta le procureur en clignant de l’œil, et il ne faut pas plus douter de sa nomination qu’on ne douterait de la vôtre si vous étiez propriétaire de ce bourg.

— Et est-il encore à vendre ?

— Sans contredit. Le propriétaire ne peut le garder plus longtemps. Le prix en est fixé, et j’ai son plein pouvoir pour terminer l’affaire. C’est grand dommage qu’on laisse l’esprit public dans cet état d’indécision, la veille d’une élection.

— En ce cas, Monsieur, j’en serai l’acquéreur.

Le procureur me regarda d’un air d’étonnement et de doute. Mais il avait trop d’expérience dans les affaires de ce genre pour ne pas sonder le terrain avant d’avancer ou de reculer.

— Le prix du bourg est de trois cent vingt-cinq mille livres sterling, Monsieur, et il n’en produit que six.

— Soit ! Je me nomme Goldencalf : en m’accompagnant à Londres, vous recevrez cette somme sur-le-champ.

— Goldencalf ! — Quoi, Monsieur, le fils unique et l’héritier de feu Thomas Goldencalf de Cheapside ?

— Lui-même. — Il y a à peine un mois que mon père est mort.

— Pardon, Monsieur, mais ayez la bonté de me prouver votre identité. Nous devons y regarder de très-près dans des affaires de cette importance. Je puis vous transmettre la propriété du bourg assez à temps pour assurer votre élection, ou celle de qui bon vous semblera. Je rendrai à lord Pledge ses petites avances, et cela lui apprendra à mieux prendre ses mesures dans une autre occasion. À quoi est bon un bourg si la parole d’un lord n’est pas sacrée ? — Vous trouverez les électeurs particulièrement dignes de votre faveur. Ce sont les hommes les plus francs, les plus loyaux, les plus droits de toute l’Angleterre. Ils ne demandent