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— Recommande ton âme à la sainte Vierge, murmura le Napolitain avec un étrange mélange de zèle chrétien et de férocité.

Ces mots présentent ordinairement une idée de charité et d’amour ; mais, malgré ce rayon d’espérance, Balthazar vit clairement le sort qui lui était réservé.

En quittant la foule qui formait un corps solide entre les mâts, Baptiste rencontra son vieil antagoniste Nicklaus Wagner. La fureur qui avait été si longtemps concentrée dans son sein, fit soudain explosion, et dans ce moment de folie il le frappa. Le vigoureux Bernois saisit son assaillant, et une lutte horrible à voir, car elle rappelait celle des brutes, s’engagea. Scandalisés par ce spectacle, offensés par ce manque de respect, et ignorant ce qui s’était passé (car la foule avait énoncé ses résolutions de cette voix brève et peu élevée que prennent ordinairement les hommes déterminés), le baron de Willading et le signer Grimaldi s’avancèrent d’un air ferme et digne pour empêcher ce honteux combat. Dans ce moment critique, la voix de Balthazar se fit entendre au-dessus du bruit de la tempête qui allait toujours en augmentant ; il invoquait non pas la vierge Marie, comme on le lui avait conseillé, mais il appelait les deux seigneurs à son secours. À ce cri, Sigismond s’élança comme un lion, trop tard pour atteindre ceux qui tenaient déjà le bourreau suspendu au-dessus des vagues, mais assez à temps pour saisir par ses habits le malheureux qui allait périr. Par un effet surhumain, la direction de la chute fut changée. Au lieu d’être englouti dans les eaux du lac, le corps de Balthazar rencontra ceux des combattants furieux, qui reculèrent sur les deux seigneurs, et au même instant ces quatre personnes disparurent sous les ondes.

Le combat des différentes régions de l’air cessa, l’air qui était sur la surface du lac céda une avalanche supérieure, et la tempête éclata dans toute sa furie.