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dans une partie de la pile de marchandises, on venait de découvrir le pont !

Le travail prit un caractère de sécurité qu’il n’avait pas auparavant ; car jusqu’alors le mouvement de la barque, et le terrain inégal sur lequel on travaillait, augmentaient les dangers causés par l’obscurité et la confusion. Maso abandonna alors son occupation active aussitôt qu’il vit ses compagnons engagés avec zèle dans l’entreprise qu’il avait mise en jeu, il cessa ses efforts personnels pour donner des ordres plus utiles qu’aucun des services qu’aurait pu rendre son bras.

— Je vous connais, signor Maso, dit Baptiste, fatigué par ses vains efforts pour arrêter le torrent, et vous répondrez de ceci ainsi que de vos autres crimes, aussitôt que nous aurons atteint Vevey.

— Vieux radoteur, tu nous aurais conduits, par ta sottise, dans un port où, lorsqu’on y est une fois, on ne peut plus faire voile pour en sortir.

— Ce lieu est situé sous vos pieds à tous deux, répondit Nicklaus Wagner ; vous, Baptiste, vous n’êtes pas moins à blâmer que ces fous. Si vous aviez quitté le port à l’heure convenue d’après nos conditions, ce danger ne nous aurait pas surpris.

— Suis-je un dieu pour commander aux vents ? Je voudrais ne vous avoir jamais vu, ni toi ni tes fromages, et du moins je voudrais que tu me délivrasses de ta présence, et que tu allasses les rejoindre au fond du lac.

— Tout cela vient de ce que tu as négligé ton devoir, et je ne sais même pas si un usage convenable des rames ne nous conduirait pas encore au port, sans qu’il soit utile de détruire ainsi notre propriété. Noble baron de Willading, nous avons ici besoin de votre témoignage ; et, comme citoyen de Berne, je vous conjure de peser toutes ces circonstances.

Baptiste n’était pas d’humeur à écouter tous ces reproches mérités, et il répondit à Nicklaus Wagner d’une manière qui eût promptement changé leur querelle intempestive en une lutte, lorsque Maso passa brusquement entre eux, et les sépara avec la force d’un géant. Cette conduite maintint la paix pendant un instant, mais la guerre de paroles continua avec tant d’acrimonie, et en termes si peu mesurés, qu’Adelheid et ses femmes, déjà pâles de terreur par le danger de la scène dont elles étaient environnées, se bouchèrent les oreilles pour ne point entendre des