Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 13, 1839.djvu/381

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce fut pendant un de ces entretiens que le cœur de Melchior de Willading, ému par les espérances du ciel, écouta d’une oreille plus indulgente la déclaration qu’Adelheid lui fit de passer sa vie dans le célibat, par respect pour elle-même et pour ses affections, si elle ne devenait pas l’épouse de Sigismond. Nous ne dirons pas que la jeune fille s’appuyait sur une philosophie aussi sublime que celle du moine, car son cœur seul avait formé cette résolution ; cependant elle avait la raison de son côté, et elle ne négligeait pas non plus d’en faire usage. Le baron éprouvait le désir si naturel à l’homme de perpétuer son existence dans celle de ses descendants. Alarmé d’une résolution si contraire à ses désirs, et touché par les exhortations du moine, il promit que si Balthazar pouvait se décharger de l’accusation du meurtre, il ne s’opposerait pas plus longtemps à cette union. Nous donnerions à nos lecteurs une opinion un peu trop favorable du seigneur de Willading si nous ne disions pas qu’il se repentît de sa promesse aussitôt après l’avoir donnée. L’état de son esprit ressemblait aux girouettes de son château, prêtes à changer de direction suivant chaque courant d’air, mais il avait trop d’honneur pour violer jamais la foi qu’il avait jurée. Il y avait des moments où il doutait de la sagesse de cette promesse, mais c’étaient de ces regrets avec lesquels ou attend un mal inévitable. S’il avait quelques espérances d’être relevé de son serment, elles étaient fondées sur une vague croyance de la culpabilité de Balthazar, quoique les protestations constantes de Sigismond à l’égard de son père eussent peu à peu affaibli cette croyance. Les espérances d’Adelheid étaient les plus fortes car les craintes de Sigismond l’empêchaient de participer entièrement à cette confiance. Lorsque les bijoux furent trouvés en la possession de Maso, et que Balthazar fut acquitté à l’unanimité, parce qu’on reconnut que son séjour dans l’ossuaire pouvait être attribué à une erreur que tout autre aurait pu commettre pendant l’orage, le baron se prépara à remplir courageusement sa promesse. Il est inutile de dire combien ce sentiment acquit de force par la déclaration du bourreau concernant la naissance de Sigismond. Maso assurait, il est vrai, que toute cette histoire avait été inventée en faveur du fils de Balthazar, mais elle était attestée par des preuves si palpables, pour ne rien dire de la manière naturelle avec laquelle elle avait été racontée, qu’il était difficile de douter de sa vérité. Quoiqu’on ignorât encore quels étaient réellement les parents de