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Cet expédient, quoique douteux fut adopté avec ardeur, tant le mystère excite d’intérêt parmi les hommes. Le désir de percer ces ténèbres était général, et les plus faibles moyens de parvenir à ce but acquéraient une importance proportionnée à la difficulté.

Sigfsmond et Maso furent placés sous la lampe, et tous les regards se tournèrent vers eux, afin de découvrir ou de s’imaginer découvrir quelques-uns des signes mystérieux de la nature. Jamais examen ne fut plus minutieux. Tous les deux offraient des preuves convaincantes de ce qu’ils annonçaient, par la forme et L’expression de leurs traits. Le teint olivâtre, l’œil noir et brillant, la taille de Maso avaient l’avantage ; son profil et l’expression pénétrante de son regard offraient aussi avec le doge une ressemblance plus frappante qu’on n’aurait pu le désirer.

Les habitudes du marin avaient probablement détruit une partie de cette ressemblance, mais elle était encore trop parfaite pour échapper à l’observation. Son teint hâlé, ses traits altérés par une existence vouée aux fatigues de tout genre qui empêchaient de prononcer sur son âge à dix ans près, contribuaient un peu à cacher ce qu’on pourrait appeler le caractère primitif de sa physionomie ; mais ses traits eux-mêmes étaient sans contredit une copie grossière de ceux du prince.

L’avantage d’une jeunesse vigoureuse rendait cette ressemblance moins parfaite à l’égard de Sigismond ; c’était comme un de ces portraits de vieillard peints dans leur jeunesse et dans des jours heureux. Les nobles traits du jeune homme étaient bien ceux du vénérable prince, mais ni les yeux, ni le teint, ni les cheveux, n’étaient ceux de l’Italie.

— Vous le voyez, dit Maso avec ironie lorsque le frère quêteur résumait ces différentes particularités, c’est une imposture manifeste. Je vous jure, par tout ce qu’il y a de plus sacré pour l’homme et le chrétien mourant, qu’autant qu’on peut connaître son père, je suis le fils de Gaëtano Grimaldi, le présent doge de Gênes. Que les saints m’abandonnent, que la mère de Dieu soit sourde à mes prières ! que tous les hommes me poursuivent de leurs malédictions, si je ne dis pas la sainte vérité !

L’effrayante énergie avec laquelle Maso prononça ces paroles solennelles, la sincérité de ses manières et peut-être pourrions-nous ajouter en dépit de ses principes, son caractère, servirent