CHAPITRE XXIX.
algré la gravité des faits qui étaient dirigés contre lui,
Maso avait conservé pendant toute cette scène ce calme et ce discernement
qui étaient le fruit d’une vie aventureuse et de dangers
multipliés. On pouvait ajouter à toutes ces causes de sang-froid
la force des nerfs que lui avait donnés la nature, et qui
n’étaient pas facilement ébranlés, quelque critique que fût sa
situation. Cependant il avait changé de couleur, et son maintien
pensif annonçait qu’il croyait avoir besoin de toute sa présence
d’esprit. Mais sa décision sembla prise lorsqu’il demanda à être
entendu, et il attendait seulement que les importuns se retirassent
avant de poursuivre son dessein. Lorsque la porte fut
fermée et qu’il se trouva seul avec ses juges, Sigismond, Balthazar
et le groupe des femmes, il s’adressa exclusivement au signor
Grimaldi, comme si le jugement qui allait décider de son sort
dépendait seulement de lui.
— Signore, dit-il, il y a eu entre nous de nombreuses allusions, et je suppose qu’il m’est inutile de dire que je vous connais.
— Je t’ai déjà reconnu pour un compatriote, répondit froidement le seigneur génois. Mais tu te tromperais si tu supposais que cette circonstance pût être favorable à un meurtrier. Si quelque considération pouvait m’induire à oublier les droits de la justice, ce serait plutôt le souvenir de tes services sur le lac Léman. De toute manière je crains de ne pouvoir rien faire pour toi.
Maso garda le silence, il regardait le seigneur génois en face, comme s’il eût voulu étudier son caractère, quoiqu’il conservât toujours l’apparence d’un profond respect.
— Signore, dit-il enfin, vous avez été favorisé par le sort dès votre enfance. Vous êtes l’héritier d’une puissante maison, dans laquelle il y avait plus d’or que d’infortune dans la cabane