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avait voulu chasser une faiblesse, son maintien devint encore une fois calme et naturel.

— Tu ne fais point de réponse ?

— Signore, je vous ai déjà répondu ; des affaires me pressent, et j’ai fait ma visite au couvent du Mont-Saint-Bernard. Je pars pour Aoste, et je serais bien aise de porter vos ordres au digne Giacomo. Je n’ai plus qu’un pas à faire pour me trouver sur les domaines de la maison de Savoie, et avec votre permission, brave capitaine, je vais m’y rendre.

Maso s’avançait un peu dans l’intention de passer devant Sigismond, lorsque Pippo et Conrad se jetèrent sur lui par derrière et lui saisirent les deux bras avec une grande force. Le visage de l’Italien devint livide, et il sourit avec le mépris et la haine d’un homme irrité. Rassemblant toutes ses forces il les mit en usage avec l’énergie et le courage d’un lion, et s’écria :

— Neptune !

La lutte fut courte, mais terrible. Lorsqu’elle se termina, Pippo sanglant, était étendu sur le roc et le pèlerin se débattait sous les griffes terribles de Neptune. Maso était debout, mais pâle et le front sombre, comme un homme qui a concentré toute son énergie physique et morale pour affronter un danger.

— Suis-je un animal pour être abandonné à ce qu’il y a de plus bas sur la terre ! s’écria-t-il ; si vous voulez m’attaquer, signor Sigismond, levez votre propre bras, mais ne me frappez pas avec la main de ces vils reptiles. Vous me trouverez un homme par ma force et par mon courage, et peut-être un homme qui n’est pas tout à fait indigne de vous.

— Cette attaque contre ta personne, Maso, n’a point été faite par mes ordres ni d’après mes désirs, répondit Sigismond en rougissant. Je me crois capable de t’arrêter à moi seul, ou sinon voilà un secours qui m’arrive auquel tu ne jugeras peut-être pas prudent de résister.

Le religieux était monté sur un quartier de rocher au moment où cette lutte commença : là, il fit un signal qui amena près de lui tous les chiens du couvent. Ces animaux se mirent en groupe, leur admirable instinct venait de leur apprendre qu’un combat était engagé. Neptune lâcha aussitôt le pèlerin et attendit, trop fidèle pour abandonner son maître et cependant trop convaincu de la force qui lui était opposée pour commencer une lutte in-