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créature est en réalité Mariette Marron de ce pays. Le canton de Vaud ne renferme rien qui puisse lui être comparé dans son genre, — impudente dévergondée ; mais il n’est pas question de cela. Elle est à présent la prêtresse de Flore, et je vous préviens qu’il n’y a pas dans nos vallons un cor qui résonne mieux dans les rochers que le gosier de cette même prêtresse ! celle qui sur ce trône représente Flore elle-même est une jeune et belle femme ; fille d’un honorable citoyen de Vevey, fort en état de lui avoir donné cette magnifique parure sans avoir recours à l’abbaye ; je vous avertis aussi que chaque fleur qui la décore a été cueillie dans son propre jardin.

— Il me semble que vous traitez la poésie de la cérémonie avec bien peu de respect, bon Peterchen : la déesse avec sa suite se place dans vos paroles à peu près au même rang que les vignerons et les laitières.

— Pour l’amour du ciel, cher Melchior, interrompit le Génois charmé de s’amuser, ne nous privez pas d’entendre les remarques si exactes de l’honorable bailli. Ce Parnasse est sans doute très-bien, mais il gagne beaucoup à des explications qui feraient honneur à un docteur de Padoue. Je vous supplie de continuer, savant Peter, afin que, nous autres étrangers, nous ne perdions aucun détail de ce spectacle.

— Vous voyez, baron, reprit avec un regard de triomphe le bailli bien encouragé, petit commentaire ne nuit jamais à la meilleure chose, quand ce serait la loi elle-même. Ah ! voici Cérès et sa compagnie avec un beau cortège ! les moissonneurs et moissonneuses représentent l’abondance de notre canton de Vaud ; signor Grimaldi, il est juste de dire que c’est une terre fertile, digne de l’allégorie. Ces drôles avec une sellette sur le dos, et portant des cuves, sont des vachers, et tous les autres sont plus ou moins occupés de ce qui concerne la laiterie. Cérès était, sans nul doute, un personnage très-important parmi les anciens, comme on peut le voir par la manière dont elle est appuyée sur les produits de la terre. Il n’y a d’honneurs solides, herr Von Willading, que ceux qui se fondent sur la propriété de champs vastes et fertiles. Vous voyez que la déesse est assise sur un trône dont nos campagnes ont fourni les simples ornements ; une gerbe de blé couvre le dais ; de riches épis d’un grain généreux sont ses seuls joyaux ; et son sceptre est une faucille. Ce ne sont que des symboles, signor Grimaldi, mais il y a des allusions qui inspirent