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un homme qui est enchanté d’échapper, au milieu d’une cérémonie, à l’observation publique. Adelheid et une jeune personne de la maison de Blonay fermaient la marche.

Comme les fonctionnaires chargés de veiller à l’ordre avaient pris tous les moyens possibles pour éclaircir la route que le bailli devait suivre, Herr Hofmeister et ses compagnons furent bientôt assis à leurs places respectives. Le bailli, avant de s’asseoir, rendit de nombreux saluts, car aucun de ceux qui étaient en situation d’attirer ses regards ne négligea une aussi belle occasion de montrer son intimité avec un homme en place, et ses yeux s’arrêtèrent enfin sur le visage heureux du père Xavier. Se levant rapidement, le bailli donna carrière à une multitude de formalités cérémonieuses qui caractérisaient la politesse de l’époque, telles que des signes de la main, un fréquent usage du chapeau, de profondes révérences, des sourires qui semblaient partir du cœur, et une grande variété d’autres gages d’amitié et de respect. Lorsque toutes ces momeries furent terminées, il reprit sa place auprès de Melchior de Willading, avec lequel il commença la conversation suivante.

— Je ne sais pas, mon noble ami, si nous avons plus de raisons pour estimer que pour détester ces moines du mont Saint-Bernard. Ils rendent de grands services à l’humanité dans leurs montagnes ; mais ce sont des diables incarnés pour propager les abominations de Rome parmi le peuple. Le commun des fidèles n’a pas une grande habileté dans les discussions de théologie, et se trouve disposé à se laisser séduire par les apparences. Un grand nombre de misérables pensent qu’il y a de la sainteté à passer sa vie sur le sommet d’une montagne glacée, pour s’occuper à faire du bien, à nourrir ceux qui ont faim, à soigner ceux qui sont malades. Les ignorants ne sont que trop portés à croire que la religion qui conduit les hommes à de pareilles choses doit être en faveur auprès du ciel.

— Ont-ils réellement tort, mon ami, et devons-nous ravir aux moines des bénédictions qu’ils ont si justement gagnées ?

Le bailli regarda attentivement son frère le bourgeois, car c’était là l’humble titre que prenait l’aristocratie de Berne, désirant connaître la profondeur de la politique du baron avant de parler librement.

— Quoique d’un rang élevé et d’une famille dans laquelle le canton a toute confiance, je pense que depuis quelque temps vous