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défense. Un autre était prêt à jurer que le chien appartenait au pèlerin, et qu’il avait l’habitude de porter sa valise ; que Maso, cédant à une vieille rancune contre le maître et le chien, avait jeté une pierre à ce dernier, et s’était vengé d’une douce remontrance du propriétaire, de la manière dont on avait été témoin : c’était le jongleur napolitain, Pippo, qui s’était attaché à Conrad depuis l’aventure de la barque, et qui était prêt à affirmer tout ce qu’on lui demandait en faveur d’un ami qui avait si grand besoin de son témoignage. Un troisième déclara que le chien appartenait véritablement à l’Italien, que la pierre avait été lancée par une personne qui était proche du pèlerin, et que ce dernier avait été injustement attaqué par Maso, qui méritait bien d’être puni pour la manière peu cérémonieuse dont il avait intercepté la respiration d’un saint homme. Ce témoin était parfaitement honnête, mais c’était un esprit vulgaire et crédule. Il attribuait l’offense primitive à un homme qui avait une mauvaise réputation, et qui était fort capable de commettre tous les péchés qu’on lui prêtait, comme ceux qu’on ne lui prêtait pas. Il avait été dupe, dans la matinée, du zèle religieux du pèlerin, circonstance qui seule l’eût empêché de croire Conrad capable d’une telle insulte, quand même il l’aurait surpris le bras levé en l’air et lançant la pierre, ce qui servait beaucoup à augmenter sa certitude que cette action avait été commise par l’individu en question ; car tous ceux qui jugent sous l’influence de propos généraux et de préjugés populaires, réunissent ordinairement tout l’odieux d’une faute sur ceux qui semblent destinés par le consentement général à servir de victime dans toutes les causes.

L’officier, après avoir entendu les trois principaux témoins et les explications confuses de ceux qui ne se prétendaient qu’à demi instruits, se trouva dans l’impossibilité de décider qui avait tort ou raison. Il en conclut donc qu’il fallait envoyer toutes les parties au corps-de-garde, y compris les témoins, pensant que c’était le meilleur moyen de rencontrer le coupable et de prévenir ceux qui porteraient témoignage à l’avenir, de ne pas se contredire les uns les autres. Au moment où cette juste sentence fut prononcée, le son de la trompette annonça l’approche d’une division des principaux acteurs, si un terme si irrévérent peut être appliqué à des hommes qui font partie d’une fête aussi renommée que celle des vendangeurs. Cette annonce donna une grande activité aux ordres de la justice, car ceux qui étaient chargés de l’exé-