montrer son mécontentement. Montant sur un ouvrage en pierre à demi renversé, il se trouva entouré d’une cinquantaine de personnes silencieuses, aux regards effarés, parmi lesquelles il reconnut plusieurs de ses plus fidèles serviteurs.
— Que vent dire ce manque de respect à vos devoirs et un abandon si subit des ossements du moine ? demanda-t-il. Mais il regarda vainement autour de lui dans l’espérance de voir par ses propres yeux ce qui était arrivé.
— Mon seigneur comte n’a-t-il pas vu et entendu ? murmura le vassal le plus proche.
— Quoi, coquin ? Je n’ai rien vu que des fous pâles et effrayés, et je n’ai entendu que les battements de leurs cœurs. Veux-tu n’expliquer ce que cela veut dire, varlet ? car si tu as quelque chose d’un coquin, du moins tu n’es pas un poltron.
Emich s’adressait à Gottlob.
— Cela n’est pas aussi facile à expliquer que vous le pensez, seigneur comte, reprit le vacher avec gravité. Ces gens sont venus ici avec tant de rapidité, parce que l’on a entendu des cris de chiens surnaturels ; d’autres disent qu’on a vu aussi le pauvre Berchthold en personne.
Emich sourit avec mépris, bien qu’il connût assez celui auquel il s’était adressé pour être surpris de la frayeur qui était peinte sur son visage.
— Tu étais attaché à mon forestier ?
— Seigneur Emich, nous étions amis, si un homme, dans une position aussi humble que la mienne, peut se servir de ce terme en parlant d’un jeune homme qui approchait de si près la personne de notre maître. Ma famille, comme la sienne, a connu de meilleurs jours, et nous nous rencontrions souvent dans la forêt que j’avais l’habitude de traverser en allant au pâturage ou en en revenant. J’aunais le pauvre Berchthold, noble comte, et j’aime encore sa mémoire.
— Je crois qu’il y a plus d’étoffe en toi que quelques sottes actions ne pourraient le faire croire ; j’ai remarqué ta bonne volonté dans différentes occasions, et particulièrement ton adresse en donnant le signal, la nuit où cette abbaye fut renversée. Tu seras nommé à l’emploi laissé vacant par la fin malheureuse de mon forestier.
Gotllob essaya de remercier son maître ; mais il était si trou-