supposer que la Coquette passerait au vent. Dans ce moment critique la masse des voiles de perroquet du croiseur anglais fut presque déchirée en deux par un boulet. Le vaisseau tomba sur le côté, les vergues s’entremêlèrent et les deux bâtiments furent engagés.
La Coquette avait tout l’avantage de la position. S’apercevant de l’importance de ce fait, Ludlow voulut rendre cette position plus sûre en jetant les grappins. Lorsque les deux vaisseaux furent ainsi accrochés l’un à l’autre, le jeune Dumont se trouva soulagé d’un immense embarras. Le fait avait suffisamment prouvé que pas un seul de ses canons n’aurait porté, tandis qu’une meurtrière décharge de mitraille venait de balayer ses ponts ; il donna l’ordre d’aborder, mais Ludlow, avec son équipage affaibli, ne s’était pas décidé à une si périlleuse évolution, sans avoir prévu les moyens d’en éviter toutes les conséquences. Les vaisseaux se touchaient seulement sur un seul point, et ce point était protégé par deux rangs de mousquets ; aussitôt que l’impétueux Français parut sur la poupe de son vaisseau, accompagné d’une troupe de matelots, un feu serré et mortel renversa toute cette troupe à l’exception d’un seul homme. Le jeune Dumont resta debout, pendant un moment son œil égaré brilla, mais son corps agile obéit encore à l’impulsion d’un esprit impétueux ; il s’élança en avant et tomba sans vie sur le pont de son ennemi. Ludlow surveillait chaque mouvement avec un calme que ni sa responsabilité personnelle, ni le bruit et les rapides incidents de cette terrible scène ne pouvaient détruire.
— Voilà le moment d’en venir aux mains, s’écria-t-il en faisant signe à Trysail de descendre de l’échelle, afin qu’il pût passer.
Son bras fut arrêté, et le vieux et grave contre-maître montra le côté d’où venait le vent.
— On ne peut se méprendre, dit-il, à la coupe de ces voiles et à la hauteur de ces espars ; le vaisseau éloigné est un autre bâtiment français.
Un regard apprit à Ludlow que Trysail avait raison ; un autre suffit pour lui indiquer ce qu’il était nécessaire d’entreprendre.
— Laissez tomber le dernier grappin ! — Coupez-le ! — Dégagez ! Ces mots furent criés à travers le porte-voix, d’un ton qui se fit entendre distinctement au milieu du tumulte du combat.
Dégagée en avant, la poupe de la Coquette céda à la pression de