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— Mais l’Italie est votre pays favori, si l’on en juge par les étoffes que vous possédez.

— L’Italie, la France et la Flandre se partagent mon temps, quoique vous ayez raison de croire que le premier de ces pays est le plus en faveur. J’ai passé bien des années de ma jeunesse sur les nobles côtes de ces régions romantiques. Une personne qui protégea et guida mon enfance, me laissa même pendant quelque temps, pour mon éducation, dans la petite plaine de Sorrente.

— Et où se trouve ce lieu ? Car la résidence d’un corsaire si fameux peut un jour devenir le thème d’une chanson, et occupera probablement les loisirs d’un curieux.

— Les charmes de celle qui parle peuvent faire excuser son ironie ! Sorrente est un village sur la côte méridionale de la célèbre baie de Naples. Le feu a apporté bien des changements dans cette douce et sauvage contrée, et si, comme les religionnaires le croient, les fontaines de la mer jaillirent jamais, et la croûte de la terre s’ouvrit pour permettre à ses sources secrètes de s’étendre sur sa surface, ce lieu doit avoir été choisi par celui dont le doigt laisse des traces indélébiles de son pouvoir. Le sol lui-même, dans toute cette région, semble avoir été vomi par un volcan, et le Sorrentin passe sa vie paisible sur un cratère éteint. Il est curieux de voir comment les hommes du moyen-âge ont bâti leur ville sur le bord de la mer, où l’élément a rongé à moitié le bassin, et comment ils se sont servis des crevasses du tuf comme de fossés pour protéger leurs murailles ! J’ai visité bien des contrées et vu la nature dans presque tous les différents climats, mais aucun lieu ne m’a paru présenter à l’œil une si belle combinaison d’effets pittoresques mêlés à de si puissants souvenirs, que cette charmante demeure sur le rocher de Sorrente.

— Racontez-moi les souvenirs qui ont laissé de si agréables traces dans votre esprit, pendant que je vais examiner à mon aise le contenu du ballot.

Le brillant contrebandier garda un instant le silence, et comme plongé dans les souvenirs du passé ; puis, avec un sourire mélancolique, il continua :

— Quoique bien des années se soient écoulées, dit-il, je puis me rappeler les beautés de cette scène comme si elles étaient encore présentes à mes yeux. Notre demeure était sur le penchant du rocher. En face, on voyait l’eau bleue de la mer, et sur le