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source. L’expérience a aussi prouvé qu’une tempête est plus destructive au lieu ou près du lieu où elle commença, qu’à celui où elle semble venir. Les coups de vent de l’est, qui visitent si souvent les côtes de la république, exercent leurs ravages dans les baies de la Pensylvanie et de la Virginie, ou les détroits des Carolines, des heures entières avant que leur existence ne soit connue dans les États plus à l’est ; et le même vent qui est une tempête à Hatteras, n’est qu’une brise près de Penobscot. Il n’y a cependant pas beaucoup de mystères dans cet apparent phénomène. Le vide qui s’est formé dans l’air et qui est la cause de tous les vents, doit être rempli d’abord des parties les plus proches de l’atmosphère, et, comme chaque région contribue à produire l’équilibre, il faut en retour qu’elles obtiennent un nouveau renfort de celles qui sont au-delà. Si une quantité d’eau donnée pouvait être subitement pompée de la mer, l’espace vide serait aussitôt rempli par un torrent provenant du fluide le plus proche, dont le niveau serait rétabli successivement par des torrents qui arriveraient avec une rapidité de moins en moins violente. Si cette abstraction était faite à quelques lieues en mer, ou près de la terre, le flux serait plus rapide du lieu où le fluide aurait la plus grande force, et le courant le suivrait.

Mais tandis qu’il existe une affinité si intime entre les deux fluides, le travail des vents, moins visible à l’œil, est par conséquent moins à la portée de l’intelligence humaine que celui de l’autre élément. Ce dernier est fréquemment sujet à l’influence directe et manifeste du premier, tandis que les effets produits par l’Océan sur l’air sont cachés à notre intelligence par leur caractère subtil. On trouve aussi, il est vrai, des courants vagues et erratiques dans les eaux de l’Océan, mais leur origine est facilement expliquée par l’action des vents, tandis que nous sommes souvent indécis sur les causes qui donnent naissance aux brises. Ainsi, le marin, même lorsqu’il est victime des flots courroucés étudie les cieux comme la source connue d’où provient le danger, et tandis qu’il combat au milieu du choc des éléments pour conserver l’équilibre de la machine délicate et audacieuse qu’il gouverne, il sait que l’objet qui présente l’apparence la plus visible et la plus formidable du danger n’est que l’instrument d’une agence invisible et puissante qui soulève les eaux devant sa course.