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Le tigre demanda au lièvre de le laisser battre ce tambour, mais celui-ci n'y consentit pas. Il dit : En ce monde avoir jamais pitié de toi ! Que je n'en aie jamais pitié, c'est ce qu'il faut. Le tigre répondit : Frère lièvre, laisse-moi un peu battre de ce tambour pour voir. Le lièvre répondit : Soit ! je vais te laisser faire. Si tu veux que ce tambour rende un son harmonieux, il te faut ouvrir le trou du dessous et boucher celui du dessus. Alors en frappant ce tambour il rendra un son très harmonieux.

Le tigre obéit au lièvre ; il ouvrit (le trou du dessous) et frappa sur celui du dessus, les guêpes sortirent par l'orifice inférieur et le lièvre s'enfuit. Les guêpes piquèrent le tigre qui se mit à gémir et à courir par toute la forêt. Quant au lièvre en fuyant pour se cacher du tigre, il vit un arbre dont les branches frottaient l'une sur l'autre et il monta sur cet arbre.

Le tigre, à demi-mort des piqûres des guêpes, courait en rauquant par toute la forêt. Enfin il se jeta dans l'eau, les guêpes ne le virent plus et retournèrent à leur nid, et le tigre échappa ainsi à leurs piqûres.

Le tigre se mit à la poursuite du lièvre ; il était dans son cœur extrêmement irrité contre lui et résolu à le dévorer. Il le trouva perché sur l'arbre et lui dit : Frère lièvre ! tu m'as trompé frauduleusement ; maintenant tu t'es caché sur cet arbre, descends vite pour que je te mange. Le lièvre répondit : Si tu veux me manger accorde-moi, je te prie, d'attendre jusqu'à midi, ensuite tu me mangeras. Maintenant je te demande de me laisser attendre une heure favorable pour jouer de ce sharanai[1] que m'ont laissé mes aïeux sur cet arbre. Le lièvre parlait ainsi mais dans son cœur il avait grand peur que le tigre ne le dévorât. Le tigre en lui-même voulait demander au lièvre le

  1. Sharanai, nom d'un instrument de musique.