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CONTES SECRETS RUSSES

filles ». Le gars attela les bœufs, mit les six sacs de blé dans la charrette et se rendit à la ville. En approchant du marché, il rencontra un Juif qui lui dit : « Bonjour, panotché, qu’est-ce que tu as à vendre ? — Rien du tout, Juif ! » Le jeune homme fut ensuite accosté par un marchand : « Qu’est-ce que vous vendez, panotché ? — Rien du tout. » Puis une jeune fille vint à passer et lui adressa la même question : « Qu’est-ce que vous vendez ? — Du blé », répondit-il. — « Combien en avez-vous ? — Six sacs. — Et qu’est-ce que vous demandez pour cela ? — Une passade ! — Vous ne pouvez pas prendre moins ? » interrogea la jeune fille, surprise d’une telle exigence. — « Non, c’est le dernier prix : si vous m’accordez une passade, je vous donnerai mon blé. — Conduis tes sacs chez moi. » Ils se mirent en route. Quand on fut arrivé devant la porte de la maison, Gritzko demanda où il fallait déposer les sacs. La fille indiqua un endroit, entra chez elle, prépara une collation, puis appela le jeune homme : « Viens ici, panotché ! » Il se rendit auprès d’elle. « Eh bien ! panotché, fais de moi ce que tu veux ! » Gritzko profita aussitôt de la permission et, quand sa passion fut satisfaite, il remercia la jeune fille de sa complaisance. Elle alors de répondre : « Remercie le Dieu saint ! »

Lorsque le gars arriva chez lui, ses parents lui demandèrent : « As-tu vendu le blé, fils ? — Je l’ai vendu. — À quel prix ? — Pour une passade. —