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CONTES SECRETS RUSSES

Le jeune homme s’habilla le plus misérablement qu’il put, mit une bride sur son épaule, prit en main un fouet et se rendit chez l’ami de son père. Il arriva dans la soirée et cogna à la fenêtre de l’izba : « Bonjour, patron ! — Bonjour, brave homme, » répondit le maître du logis, « qu’est-ce qu’il te faut ? — Accorde-moi un gîte pour cette nuit ! — Mais d’où viens-tu ? — Je viens de loin, je demeure à cent verstes d’ici. Je cherche les chevaux de mon maître, diadiouchka ; on me les a volés dans un endroit où je m’étais arrêté pour passer la nuit et voilà trois jours que je les cherche sans pouvoir les retrouver. — Soit, loge chez nous. » Le jeune homme entra dans la maison, ôta la bride de dessus son épaule et la pendit à un clou ; ensuite il s’assit sur un banc et se mit à examiner la jeune fille. — « Et chez vous, qu’est-ce qu’on dit de bon ? » demanda le paysan à son hôte. — « Les nouvelles de chez nous ne sont pas bonnes, diadiouchka, on n’entend parler que de malheur. — Quoi donc ? — Eh bien, chaque nuit il y a des gens mangés par les loups ; depuis deux semaines, il ne se passe guère de nuit où les loups ne dévorent de cinq à dix personnes ! » La conversation se prolongea pendant quelques instants, ensuite on se coucha : le vieillard et sa femme dans la chambre, leur fille et le voyageur dans le vestibule, mais la première sur un lit et le second sur un tas de foin.

Quand il fut couché, le gars ne cessa de prêter