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CONTES SECRETS RUSSES

entrant. — « Bonjour, mon cher. Qu’est-ce que tu nous diras de bon ? — J’ai été aujourd’hui à l’église et j’ai entendu qu’il est dit dans l’Écriture : Si quelqu’un donne une vache à son père spirituel, elle lui en amènera sept autres ! Eh bien, batouchka, je viens offrir ma vache à Votre Grâce. — C’est bien, mon cher, de te souvenir de la parole divine ! Dieu te rendra cela au septuple. Conduis, mon cher, ta vache à l’étable et mets-la avec les miennes. »

Le paysan déféra à cet ordre, mais, quand il rentra chez lui, sa femme l’assaillit de reproches : « Pourquoi, vaurien, as-tu donné la brunette au pope ? Tu veux, n’est-ce pas, que nous crevions de faim comme des chiens ? — Eh ! que tu es sotte, » répliqua le mari ; « est-ce que tu n’as pas entendu ce que le pope a lu à l’église ? Attends un peu, notre vache nous sera rendue avec sept autres, et alors nous aurons du lait à bouche-que-veux-tu. »

Le paysan resta tout l’hiver sans vache. Arriva le printemps ; on conduisit le bétail dans les pâturages, et les vaches du pope y allèrent comme les autres. Le soir, le vacher ramena le troupeau au village ; toutes les vaches reprirent le chemin de leurs étables respectives, mais celle que le moujik avait donnée au pope revint, par habitude, chez son ancien maître ; les sept vaches de l’ecclésiastique s’étaient tellement habituées à leur nouvelle compagne qu’elles la suivirent jusqu’à dans la cour du