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Aussitôt que le roi l’aperçut, il s’écria : « Quoi ! vous êtes prêt à partir ? — L’on ne peut avoir trop de diligence pour exécuter vos commandements, sire, répliqua-t-il ; je viens prendre congé de vous. » Le roi ne put s’empêcher de s’attendrir, voyant un chevalier si jeune, si beau, si parfait, sur le point de s’exposer au plus grand péril où un homme pouvait jamais se mettre.

Il l’embrassa, et lui donna son portrait enrichi de gros diamants. Fortuné le reçut avec une joie extraordinaire ; les grandes qualités du roi l’avaient touché à tel point, qu’il n’imaginait rien au monde de plus aimable que lui ; et s’il souffrait en le quittant, c’était bien moins par la crainte d’être englouti du dragon, que par la privation d’une présence si chère.

Le roi voulut que son ordre particulier, pour Fortuné, d’aller combattre, en renfermât un général à tous ses sujets de lui aider et de lui donner les secours dont il pourrait avoir besoin ; ensuite il prit congé du roi, et, pour qu’on n’eût rien à remarquer dans sa conduite, il alla chez la reine, qui était à sa toilette, entourée de plusieurs dames. Elle changea de couleur lorsqu’il parut. Que n’avait-elle pas à se reprocher sur son chapitre ? Il la salua respectueusement, et lui demanda si elle voulait l’honorer de ses ordres, qu’il allait partir. Ce mot acheva de la déconcerter ; et Floride, qui ne savait rien de ce que la reine avait tramé contre le chevalier, resta fort éperdue. Elle aurait bien voulu l’entretenir en particulier, mais il fuyait des conversations si embarrassantes.

« Je prie les dieux, dit la reine, de vous faire vaincre, et de vous