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BABIOLE.

fuir. Ce n’était pas une chose bien difficile : depuis qu’elle parlait on ne l’attachait plus ; elle allait, elle venait et rentrait dans sa chambre aussi souvent par la fenêtre que par la porte.

Elle se hâta donc de partir, sautant d’arbre en arbre et de branche en branche jusqu’au bord d’une rivière ; l’excès de son désespoir l’empêcha de comprendre le péril où elle allait se mettre en voulant la passer à la nage, et sans rien examiner, elle se jeta dedans. Elle alla aussitôt au fond ; mais comme elle ne perdit point le jugement, elle aperçut une grotte magnifique, tout ornée de coquilles, elle se hâta d’y entrer. Elle y fut reçue par un vénérable vieillard, dont la barbe descendait jusqu’à sa ceinture ; il était couché sur des roseaux et des glaïeuls ; il avait une couronne de pavots et de lis sauvages ; il s’appuyait contre un rocher, d’où coulaient plusieurs fontaines qui grossissaient la rivière.

« Eh ! qui t’amène ici, petite Babiole ? dit-il en lui tendant la main. — Seigneur, répondit-elle, je suis une guenuche infortunée ; je fuis un singe affreux que l’on veut me donner pour époux. — Je sais plus de tes nouvelles que tu ne penses, ajouta le sage vieillard ; il est vrai que tu abhorres Magot, mais il n’est pas moins vrai que tu aimes un jeune prince, qui n’a pour toi que de l’indifférence. — Ah ! seigneur, s’écria Babiole en soupirant, n’en parlons point, son souvenir augmente toutes mes douleurs. — Il ne sera pas toujours rebelle à l’amour, continua