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jours, mangeant leurs provisions ; l’homme dit alors :

« Femme, nous ne pouvons continuer ainsi à manger sans rien gagner. Tu feras des paniers. »

Il sortit, coupa des baguettes et les apporta chez lui ; la princesse se mit à les tresser ; mais l’osier était dur et blessait ses mains délicates.

« Je vois que cela ne va pas, dit l’homme ; file plutôt ; tu réussiras peut-être mieux. »

Elle se mit à filer ; mais le fil roide lui coupa les doigts jusqu’au sang.

« Vois-tu, lui dit son mari, tu n’es bonne à aucun travail ; me voilà bien tombé avec toi ! Allons ! je vais essayer de t’acheter de la poterie, et tu iras la vendre au marché.

— Hélas ! se dit-elle, quand les gens du royaume de mon père viendront au marché et qu’ils me verront vendre des pots, comme ils vont se moquer de moi ! »

Ce fut inutile, elle dut se soumettre sous peine de mourir de faim. La première fois, elle s’en tira encore assez bien ; on achetait volontiers à cette femme, parce qu’elle était belle et on lui payait ce qu’elle demandait : plusieurs personnes même lui donnèrent de l’argent en lui laissant ses pots. Les deux époux vécurent de ce gain jusqu’à ce qu’il ne restât plus rien. Alors le musicien racheta des pots neufs et la femme se plaça au coin du marché, étala sa marchandise autour d’elle et attendit les chalands. Tout à coup un soldat ivre arriva au galop de son cheval, qui piétina les pots et les brisa en mille morceaux. La femme se prit à pleurer, ne sachant que faire dans son angoisse.

« Ah ! que vais-je devenir ? s’écria-t-elle ; que va dire mon mari ? »

Elle courut à la maison pour lui raconter son malheur.