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une grande montagne creuse, où vivaient ces petits êtres.

Tout y était petit, mais si beau et si gentil qu’on ne saurait le décrire. L’accouchée était dans un lit d’ébène, dont les pommes étaient autant de perles ; les couvertures étaient brodées d’or, le berceau en ivoire et la baignoire en or.

La servante fut donc marraine, puis s’apprêta à s’en retourner au logis. Mais les petits hommes insistèrent tellement qu’elle consentit à rester trois jours. Elle passa ce temps joyeusement et dans les plaisirs ; et les Wichtelmænner faisaient tout ce qu’elle désirait.

Lorsqu’elle voulut s’en aller, ils lui mirent plein ses poches d’or et la reconduisirent hors de la montagne.


Arrivée à la maison, elle reprit son balai qui était encore dans le coin où elle l’avait mis et recommença à balayer. Alors survinrent des personnes de la maison qui lui demandèrent ce qu’elle voulait et qui elle était. Et elle vit que ce n’étaient pas trois jours, comme elle le pensait, mais sept ans, qu’elle avait passés dans la montagne avec les petits hommes ; et ses maîtres étaient morts pendant ce temps-là[1].


TROISIÈME CONTE

Les Wichtelmænner avaient enlevé un enfant à sa mère et

  1. Dans ce monde surnaturel, l’homme, quand il s’y trouve transporteé ne s’aperçoit pas du cours du temps ; ou plutôt, le temps est suspendu pour lui. tel il n’en retrouve la notion et les effets qu’en rentrant dans le monde ordinaire. On se rappelle l’histoire de ce moine, citée comme preuve des jouissances de l’éternité dans les sermons du moyen âge : il croyait n’avoir écouté que pendant une matinée le chant d’un oiseau envoyé par Dieu, et l’avait écouté pendant trois cents ans, oubliant toutes choses dans la douceur de son extase.