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Non-seulement le document inédit que nous venons de transcrire fixe de la manière la plus précise la date de la naissance du comédien De Brie, mais il nous apprend aussi l’orthographe du nom de Villequin qui a souvent varié dans les actes de l’état civil, ou bien suivant certains auteurs qui eurent occasion de mentionner dans leurs ouvrages, soit le comédien de Molière, soit le peintre Estienne Villequin, son frère, dont nous allons aussi parler. Ce n’est plus Wilquin, Vilquin, Villequain ou bien encore Villelain comme dans le Mercure de France de 1740, qu’il faut écrire ce nom, lorsqu’on parle de l’acteur de Molière ou du peintre de Jésus guérissant l’aveugle de Jéricho[1], mais bien Villequin, conformément à l’acte de baptême rapporté ci-dessus. Et d’ailleurs, à défaut de cet acte de baptême, peut-être aurait-on pu trouver la véritable orthographe de ce nom en se rappelant le rôle que l’acteur De Brie remplissait dans le Sganarelle de Molière, le personnage de Villebrequin, dont le nom n’était autre que la parodie du nom du comédien lui-même.

L’on rencontre aussi parfois le nom de théâtre de Villequin écrit en un seul mot, Debrie, ou même en deux mots : De Brix ; il est évident que c’est encore là une erreur. Lorsque La Grange note dans son journal, à la date d’octobre 1659, l’accouchement de mademoiselle De Brie, il écrit ce nom en deux mots, et l’on s’explique fort bien que Villequin n’ait cherché son nom de théâtre que dans la dénomination de son origine : Edme Villequin, originaire de Brie. Enfin l’on ne s’arrêtera pas non plus au prénom d’André qui lui est donné sur un registre paroissial de 1670 ; c’est évidemment le résultat d’une erreur commise par le rédacteur de l’acte. Aucun de ses parents n’a d’ailleurs porté ce prénom.

Les cinq portraits qu’on a conservés de l’acteur De Brie, et notamment l’eau-forte reproduite d’après l’estampe de J. Sauvé, sur le dessin de P. Brisart, nous permettent d’esquisser sa physionomie. Sa figure était maigre, allongée, le nez très-long et presque droit. Si l’on en croit Molière, Villequin était fort laid, d’un caractère détestable, difficile à vivre ; et c’était de bon cœur, paraît-il, qu’à son entrée en scène, sous l’habit du notaire dans l’École des Femmes, Arnolphe pouvait s’écrier en prenant la fuite :

« La peste soit de l’homme et sa chienne de face ! »

  1. Tableau conservé au musée du Louvre.