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jouée par Molière auprès de Monseigneur Chigi pour lui faire accueillir la lecture des trois premiers actes de Tartuffe, il n’en reste pas moins acquis, comme un fait hors de doute, qu’au palais de Fontainebleau cette lecture eut lieu dans les premiers jours d’août 1664, et que le légat du pape a donné son approbation à l’Hypocrite, comme plus tard il accordait la même faveur à Don Juan, « ce tartuffe d’amour, » qui lui aussi eût sa petite persécution.

Cette intervention du légat du Pape, à propos de Tartuffe et de Don Juan, fit même dire à un critique du XVIIe siècle, qu’il semblait à entendre Molière, que M. le légat n’était venu en France que pour lui donner son approbation et lui apporter un bref particulier du Pape pour jouer des pièces ridicules ; mais, comme l’a fait justement remarquer M. Ed. Fournier, est-ce qu’à chaque pas, dans la vie de Molière, nous ne rencontrons pas des prêtres qui le recherchent et le choient, tant il semble qu’il y ait en lui quelque chose qui séduit et qui attire ?

Il séduisait et il attirait si bien à lui toutes les intelligences élevées de son temps, comme il retient encore aujourd’hui toutes nos sympathies, que malgré l’interdiction du grand Roi, partout, à la cour aussi bien qu’à Villers-Cotterêts, chez Monsieur, frère du Roi, que chez les bourgeois du Marais, à la ville, chacun se disputait le plaisir d’entendre le Tartuffe, et l’on se rappelle ces deux vers de Boileau, dans sa troisième satire, disant, surtout ne manquez pas à notre réunion :

Molière, avec Tartuffe, y doit jouer son rôle,
Et Lambert, qui plus est, m’a donné sa parole.


III.


Molière n’a pas dû revenir avec sa troupe au château de Fontainebleau après 1664, mais ses pièces y furent jouées sous Louis XV et Louis XVI. En 1725, le 5 septembre, Amphytrion et le Médecin malgré lui furent représentés dans la salle de la Grande-Cheminée, et le 14 octobre 1783, dans la salle de la Comédie, l’Amphytrion y fut de nouveau joué.

Nous ne voulons pas parler de Molière à Fontainebleau, sans