Page:Constant - Molière à Fontainebleau (1661-1664), Carro, 1873.djvu/13

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 7 —

les moules en terre rapportés de Rome, et renforcés avec l’argile prise au port de Valvins, sur les bords de la Seine, à quelques kilomètres de Fontainebleau. La galerie dont nous parlons était la plus grande de toutes celles du château, nous dit le père Dan ; « aussi estoit-elle autrefois apapelée la Grande Salle, ayant vingt toises de long et cinq de large. Par la suite, on la nomma la Salle de la Belle Cheminée, depuis qu’en l’an mil cinq cens quatre vingts dix neuf, Henry le Grand y fit édifier, à l’une de ses extrémités, celle qui y est, laquelle luy donne ce nom, et qui est bien une des plus belles qui se voient point en quelque lieu que ce soit. Elle est encore appelée la Salle de la Comédie, à cause d’un grand théatre, lequel y est à l’un des bouts qui regarde directement la dite cheminée, et sert pour cet effet. »

Le père Dan, qui nous donne si exactement les dimensions de cette grande galerie, ne nous en indique pas l’élévation. Il será facile de se faire une idée de sa hauteur, lorsqu’on aura lu, dans le même écrivain, la description de la Belle Cheminée.


Elle a vingt-trois pieds de haut, dit-il, et vingt de large, laquelle consiste en quatre grandes colonnes corinthes d’un marbre brogatelle bien diversifié, fort rare et exquis, avec les bases et les chapiteaux de marbre blanc ; elles posent (ces colonnes) sur deux grands piédestaux enrichis de diverses figures de petits enfants en basse-taille de marbre blanc, qui soutiennent les chiffres de ce grand prince (Henri IV) ; où là sont encore aux quatre coins des consoles de bronze.

Au milieu de chacun piédestal est une niche où il y a un beau et grand vase de bronze, avec plusieurs enrichissements et ornements de divers marbres fort précieux.

Dans le milieu de cette cheminée entre les colonnes, est une grande table de marbre noir, sur laquelle est la figure et statue à cheval du roy Henry-le-Grand à demy relief, et grande comme le naturel ; il est armé, et a la teste couronnée d’un laurier, où au-dessous de ses pieds est un casque de marbre blanc ; et plus bas dans un quadre de même matière et couleur, est une basse-taille, où est représentée la bataille d’Ivry, et la reddition de la ville de Mante.

Aux deux costés de cette figure du roy, entre deux colonnes de part et d’autre, il y a deux autres grandes statues, encore de marbre blanc ; l’une figure l’Obéyssance, qui tient en main un joug avec une dépouille de lion ; et l’autre la Paix avec un flambeau d’une main, duquel elle semble mettre le feu dans un amas d’armes qui sont à ses pieds…


Tel était le chef-d’œuvre de Jacquet, dit de Grenoble, auquel