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Cette réponse vint enfin et fut un refus formel. Il fallut donc m’expliquer une dernière fois avec Kentish, et il me prescrivit de vendre mon cheval et d’aller, avec ce que j’en tirerais, comme je pourrais, où je voudrais. Le seul service qu’il m’offrit fut de me mener chez un marchand de chevaux qui me l’achèterait tout de suite. Je n’avais pas d’autre parti à prendre ; et après une scène attendrie où je me serais brouillé tout à fait avec lui s’il ne s’était pas montré aussi insensible à mes reproches qu’il l’avait été à mes prières, nous allâmes ensemble chez l’homme dont il m’avait parlé. Il m’offrit quatre louis de ce cheval qui m’en avait coûté quinze. J’étais dans une telle fureur qu’au premier mot je traitai indignement cet homme qui au fond ne faisait que son métier, et je faillis être assommé par lui et ses gens. L’affaire ayant manqué de la sorte, Kentish, qui commençait à avoir autant d’envie d’en finir que moi, m’offrit de me prêter dix guinées à condition que je lui donnerais une lettre de change pour cette somme, et que de plus je lui laisserais ce cheval qu’il promit de vendre comme il le pourrait à mon profit. Je n’étais le maître de rien refuser.