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répondis dans le langage de l’amour le plus passionné. J’obtins une seconde lettre un peu plus insignifiante que la première ; de mon côté, je me refroidis pendant que nos lettres couraient la poste ; je n’écrivis plus, et notre liaison finit.

Je revis pourtant madame Trevor à Paris, trois mois après : je n’éprouvai aucune émotion, et je crois que la sienne ne fut causée que par la surprise de voir en moi un détachement aussi complet. La pauvre femme continua encore quelques années son métier de coquette, et se donna beaucoup de ridicules, puis elle retourna en Angleterre où elle devint, m’a-t-on dit, à peu près folle d’attaques de nerfs.

Ces premiers mois de mon séjour à Paris furent très agréables. Je fus parfaitement reçu par la société de M. Suard, chez qui j’allai demeurer de nouveau [1]. Mon esprit qui manquait alors tout à fait de solidité et de justesse, mais qui avait une tournure épigrammatique très amusante, mes connaissances qui, bien que fort décousues, étaient supérieures à celles de la plupart des gens de lettres de la génération qui

  1. Voir Appendice XIV, p. 116.