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La fille de Camma contemple le Gaulois.
Esus ! quelle douleur et quel poignant spectacle !
Péniblement, étreint par un mortel obstacle,
Le guerrier chancelant se lève et se raidit.
Est-ce là le héros que chante le bardit ?
Front, épaule, cheveux, sont couverts de souillures ;
La saie ensanglantée ouvre ses déchirures
Et montre sur le flanc l’écharpe de fin lin,
Sur lequel, épuisé, Lez-Breiz pose sa main.
Une goutte de sang hésite dans sa chute ;
Une larme brûlante, à la paupière, lutte ;
La poitrine se plaint et la bouche gémit.
De passion, d’horreur, la prêtresse frémit ;
Et de nouveau sa voix, son âme lui répète :
« O Lez-Breiz, est-ce toi, héros de la défaite ? »
« —... Tendre Bélisana, vois ce que peut l’amour !
« Pour ma Gaule et pour toi, j’ai forcé tout un jour
« L’impitoyable mort à me garder la vie !
« Je sens le doigt glacé ; le trépas me convie !
« Tiens ! prends le gage saint que mon sang rend vermeil ;
« Je lui dois un baiser avant le grand sommeil ! »
Et la main défaillante arrache à sa blessure
Le lin rouge qu’il baise avec un doux murmure.
Puis le héros s’affaisse, un bras toujours tendu,
Comme un chêne s’abat, par la foudre fendu.
D’un bond la druidesse est dans l’autre nacelle,
Mais la Gauloise pleure et l’amante chancelle,
Quand l’écharpe et la main touchent sa propre main ;
Que le sang rafraîchit la fièvre de son sein ;
Que la bouche entr’ouverte, à son oreille encore,
Dans un dernier soupir, murmure : « Je t’adore,
« O ma Bélisana ! ô Gaule, ô mon pays ! ! »
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